Café Society


New York, dans les années 30. Coincé entre des parents conflictuels, un frère gangster et la bijouterie familiale, Bobby Dorfman a le sentiment d'étouffer ! Il décide donc de tenter sa chance à Hollywood où son oncle Phil, puissant agent de stars, accepte de l'engager comme coursier. À Hollywood, Bobby ne tarde pas à tomber amoureux. Malheureusement, la belle n'est pas libre et il doit se contenter de son amitié. 

Jusqu'au jour où elle débarque chez lui pour lui annoncer que son petit ami vient de rompre. Soudain, l'horizon s'éclaire pour Bobby et l'amour semble à portée de main...




Présenté en ouverture du récent Festival de Cannes, le Woody Allen cuvée 2016 s’affiche comme une belle petite comédie pleine de charme. Il est un fait : du haut de ses quatre-vingt printemps, le stakhanoviste assure une production annuelle qui ne faiblit pas. Si certains films apparaissent comme mineurs (Magic In The Moonlight), d’autres arpentent les cimes de l’excellence (Blue Jasmine). Quoi qu’il en soit, c’est toujours un rendez-vous attendu. Pour la livraison qui nous concerne, on se situe très clairement dans le haut du panier même si elle n’atteint pas la qualité de ses grandes œuvres telles que «Annie Hall» ou «Manhattan».

Durant une bonne heure et demie, le New-Yorkais nous balade de la Grande Pomme à Hollywood au rythme d’un chassé-croisé amoureux. Dans les années 30, Bobby décide de tenter sa chance dans l’industrie cinématographique grâce à un piston de tout premier choix, son oncle Phil, agent de stars influent. On suit les tribulations de ce jeune homme qui ne tarde pas à tomber amoureux. Le hic, c’est que la belle de ses rêves n’est pas libre. De l’amour espéré, il doit finalement se contenter de son amitié. Jusqu’au jour où l’inaccessible devient possible… Soudain, l’horizon s’éclaire pour Bobby et l’amour semble à portée de main.

Pour interpréter ce héros, notre binoclard neurasthénique préféré a su trouver en Jesse Eisenberg - qu’il a déjà dirigé dans l’inégal «To Rome With Love» - un parfait alter-ego. En réalité, le jeune acteur est le meilleur avatar du cinéaste qui existe. Un clone sidérant! Il a tout: la démarche, la nervosité, la mélancolie, l’humour désenchanté, le débit de paroles… Face à lui, Kristen Stewart s’en sort avec les honneurs. Mais chez Woody Allen, le plus intéressant est souvent à chercher dans la galerie des seconds rôles. A ce titre, Steve Carell, méconnaissable, est extraordinaire, de même que le trio juif formé par Jeannie Berlin, Ken Stott et Corey Stoll (Hemingway dans son chef-d’œuvre «Midnight in Paris»), totalement désopilant car servi par des dialogues au cordeau (ah, les scènes de ménage en yiddish!). Quant à Woody himself, il n’est pas loin. Il y donne de la voix (off) dans des commentaires savoureux.

Le talent narratif de l’octogénaire n’est plus à démontrer. Une fois encore, le réalisateur nous livre un conte sur l’ironie de l’existence, entre rires et larmes, le tout saupoudré de ses sempiternelles obsessions (l’amour, la mort, la famille, le sens de la vie etc.). Tout y est fluide, en parfaite harmonie avec les images, lesquelles sont d’ailleurs somptueuses. Et pour cause, ce dernier s’est octroyé les services de Vittorio Storaro, véritable orfèvre. Le légendaire chef-opérateur de Francis Ford Coppola («Apocalypse Now», c’est lui) emballe le métrage d’une superbe enveloppe. Disons-le, esthétiquement, c’est de la bel ouvrage. Cet écrin distille en outre un charme vintage irrésistible (atmosphère jazzy avec décors, costumes et coiffures rétro) et porte un regard à la fois drôle, acerbe et nostalgique sur l’âge d’or d’Hollywood.


Si l’on peut regretter le manque d’audace et de fraîcheur dans le propos ainsi qu’un essoufflement dans le second acte, on se réjouira par contre de voir Woody Allen travailler sa réalisation ; une mise en scène allègre qui prend soin de laisser le temps et l’espace aux comédiens pour jouer. In fine, si la romcom’ ne fait pas dans l’originalité, elle parvient tout de même à séduire le tout-regardant par son spleen doux-amer et son refus d’embrasser les poncifs du genre. 

Note: 
Critique: Professeur Grant

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