Downton Abbey
Les Crawley et leur personnel intrépide se préparent à vivre l'événement le plus important de leur vie : une visite du roi et de la reine d'Angleterre. Cette venue ne tardera pas à déclencher scandales, intrigues amoureuses et manigances qui pèseront sur l'avenir même de Downton.
I. « We’ve
been expecting you »
On avait quitté la
somptueuse demeure de Downton Abbey (en vérité, celle de Highclere Castle) au
bout d’une sixième saison en se disant que l’auteur britannique Julian Fellowes,
membre de la Chambre des Lords, avait décidément bien mené sa barque. Un « period
drama » majestueux en tous points (intrigues, casting, décors…) qui
n’appelait aucun épilogue. Quel ne fut pas alors notre surprise lorsque le showrunner annonça vouloir remettre le
couvert par l’entremise de Focus Features, la branche indé de la major Universal. Un long-métrage en
forme de suite pour satisfaire l’appétit insatiable des aficionados. Une
annonce accueillie de notre côté avec une petite dose de scepticisme. C’est que
tout avait déjà été dit, raconté, surligné voire même répété dans la série. Si
bien que la pénultième saison laissait déjà poindre une certaine lassitude.
II. Branle-bas
de combat
Et puis vint l’annonce du
synopsis. Une idée somme toute royale qui méritait bien d’être mise en scène
avec panache, que ce soit pour la petite lucarne ou le grand écran. Finalement,
ce sera dans les salles obscures. Nous sommes en 1927. De l’eau est passée sous
les ponts depuis le mariage d’Edith. Alors que le comte de Grantham et son
épouse ont dû réduire le nombre des domestiques et que Mary et Henry ont décidé
de quitter la splendide demeure, toute la maisonnée apprend l’arrivée du roi
George V et de la Reine Mary. Autrement dit, c’est le branle-bas de combat. Sauf
que le personnel de Downton est prié de faire un pas de côté. L’entourage privé
de la couronne prend le relais non sans dédain. Les domestiques décident alors
de se rebeller tandis que Mary fait appel au fraîchement retraité Carson, lui qui
a tant de fois sauvé le domaine dans le passé.
III. Du
petit au grand écran
A la question de savoir
si Julian Fellowes est parvenu à se défaire du format sériel, la réponse est…
non ! Certes, le scénariste a bâti son scénario sur une trame principale
alléchante : la venue du monarque. Un fil rouge prétexte à une enfilade de
sous-intrigues plus ou moins passionnantes censées faire exister la vingtaine
(!) de personnages à l’écran. En cela, le long-métrage s’adresse uniquement aux
fans de la première heure. Les autres resteront sur le banc de touche car ils
ne biteront rien aux nombreuses références attachées aux backgrounds des
protagonistes. Ainsi, le film a les défauts de ses qualités. La multiplication
des intrigues permet à chaque acteur d’avoir de la matière substantielle à
défendre devant la caméra, chaque personnage ayant son moment de gloire. A
contrario, le récit s’avère beaucoup trop mécanique, faisant de chaque
situation un pseudo événement, parfois surjoué.
IV. Démesure
narrative
L’écriture, bien trop
apparente, empêche donc le spectateur de s’immerger complètement.
Rebondissements factices et retournements de situation hasardeux voire
capillotractés viennent nous assommer sans que nous nous en rendions compte.
Cela émis, cette démesure narrative permet à cette fiction de filer à bride
abattue vers un dénouement qui caresse les fans dans le sens du poil. On ne
s’ennuie jamais, bousculé ici par une émotion soudaine, riant à gorge déployée
là, grâce à un humour généreux. On vous sert en prime des dialogues aux petits
oignons prononcés par des comédiens délectables. Les saillies caustiques de la
Comtesse Violet Crawley (adorable Maggie Smith qui fait son miel de chaque punchline) sont toujours aussi
savoureuses tandis qu’on apprécie les errances de l’ingénu valet de pied
Molesley, incarné avec brio par Kevin Doyle.
V. Des
paillettes dans la vie de l’aficionado
Téléfilm de luxe aux
ambitions cinématographiques proches du néant (mise en scène anecdotique s’appuyant
lourdement sur sa débauche de moyens) mais au rythme soutenu, « Downton
Abbey » doit se voir comme un double-épisode au caractère quelque peu
exceptionnel dû à son mode de distribution inédit. Une sorte de « Christmas
Special »… en automne… au cinéma. In fine, si vous êtes un mordu de la
série, n’hésitez pas, foncez fissa chez votre exploitant de salles préféré car ce
métrage risque bien de mettre des paillettes dans votre vie.
Note : ★★★
Critique : Professeur Grant
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