12 Years A Slave


Les États-Unis, quelques années avant la guerre de Sécession. 
Solomon Northup, jeune homme noir originaire de l’État de New York, est enlevé et vendu comme esclave. 
Face à la cruauté d’un propriétaire de plantation de coton, Solomon se bat pour rester en vie et garder sa dignité. 
Douze ans plus tard, il va croiser un abolitionniste canadien et cette rencontre va changer sa vie…









On avait donc vu juste avec notre pronostic. Visionné bien avant son triomphe lors de la 86e cérémonie des Oscars, il ne faisait déjà plus aucun doute à l'époque quant au futur sacre de «Twelve Years A Slave». Face à lui, seul «The Wolf of Wall Street» pouvait faire le poids. Mais son histoire irrévérencieuse, son traitement licencieux et la mise en scène sans concession de Martin Scorsese ont choqué les membres les plus puritains de l’Académie - et ils sont nombreux. Du coup, Steve McQueen pouvait dormir sur ses deux oreilles, son magnifique métrage ne pouvait que remporter la prestigieuse statuette dans la catégorie reine, soit celle du «Meilleur film» de l’année 2013.



Il n’y a strictement rien d’injuste là-dedans tant le réalisateur a su combiner sa force de frappe de ses précédents films dits «d’auteur» avec une forme classique de long-métrage à visé mercantile et ipso facto accessible à toutes les pupilles. Le metteur en scène le savait, pour sortir une œuvre universelle, celui-ci devait absolument adoucir son style visuel plutôt rigide. S’il met de côté ses obsessions esthétiques, le cinéaste ne renie pas pour autant la singularité de son cinéma et offre quelques effets qui feront sens aux yeux des cinéphiles mais qui mettront une partie du public sur la touche.

Comme ce plan interminable de pendaison qui voit le héros, en plein calvaire, les pieds dans la boue, se débattre inlassablement pour ne pas suffoquer. Tout cela sous le regard neutre des autres esclaves, frères d’infortune de la ferme. La caméra ne bouge pas. Les minutes défilent comme des heures. La scène est insoutenable. La salle de cinéma se fait totalement silencieuse. Le résultat escompté est là. Sans détour, l’esthète britannique appelle à la réflexion et rend, in fine, le spectateur actif et non passif. Virtuose!

Après «Hunger» et «Shame», McQueen corrobore l’idée qu’il est le cinéaste de la souffrance humaine, de la douleur physique. Une expérience doloriste partagée par le spectateur, les yeux humectés, la gorge nouée, le dos parsemé de frissons. Sans jamais quitter son personnage, l’ex-artiste plasticien rend parfaitement bien la déréliction du héros, poursuivant son chemin de croix qui aura duré, comme le titre du film l’indique, douze ans. Avec un réalisme criant, celui-ci montre l’ignominie de l’esclavage et dénonce une Amérique plongée dans la turpitude. Par ailleurs, il est le premier artiste noir à traiter cette infamie sur pellicule.

A travers l’histoire vraie de Salomon Northup, Steve McQueen, refusant toute sensiblerie, réalise une autopsie au scalpel de la pratique de l’esclavage dans les Etats-Unis au dix-neuvième siècle et transmet toute l’horreur de la condition noire. Ce dernier signe tout autant un brûlot fort et maîtrisé qu’un indispensable travail de mémoire. Enfin, impossible de ne pas faire écho à la qualité de l’interprétation des protagonistes: Chiwetel Ejiofor, Lupita Nyong’o, lauréate de l'Oscar de la meilleure actrice dans un second rôle, et Michael Fassbender offrent des compositions incroyables. Fort, très fort.

Note:
Critique: Professeur Grant

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