A Most Wanted Man


Anton Corbjin est venu spécialement à Deauville défendre son film « Un homme très recherché ». Après « Control » et « The American », le réalisateur hollandais nous livre un film d’espionnage efficace et nous permet de voir une dernière fois Philip Seymour Hoffman en haut de l’affiche.

Les attentats du 11 septembre 2001 ont profondément marqué la conscience collective.Tout d’abord, parce que les Etats-Unis n’avaient jamais été attaqués sur leur territoire. Ensuite, parce que ce tragique événement marquait le début d’un nouveau genre de conflit : celui des attentats, des kamikazes et des victimes innocentes. Pour la première fois, l’ennemi ne constituait pas une armée clairement identifiable et marchant en rangs serrés. Ici l’action se déroule non pas aux Etats-Unis mais en Europe, dans la ville de Hambourg. Celle-ci aurait jadis abrité une cellule terroriste à l’origine des attaques envers le Wolrd Trade Center. Nous suivons le parcours d’un immigré russo-tchétchène fortement torturé débarquant au sein d’une communauté musulmane afin de récupérer l’héritage de son père acquis par le sang. Il n’en faut pas plus pour que les services secrets allemands et américains agissent de concert. Toute la question du film est de savoir si cet homme est une victime ou un extrémiste aux intentions malveillantes ?




Fan inconditionnel de Jason Bourne et de James Bond, passez votre chemin ! Ici, point d’explosions en tout genre, ni de courses poursuites à travers toutes les villes du monde au bras des filles les plus jolies ! Les espions dépeints ici sont quelconques. Ils pourraient être vous ou moi. Ils se tapissent et agissent dans l’ombre, surveillent, manipulent, exercent une pression psychologique certaine. Alors oui, nous avons le sentiment d’évoluer dans un film « réaliste ». Oui, ce film parfaitement maitrisé nous tient en haleine durant un peu plus de deux heures... pour peu que le genre ne vous rebute pas, courez le voir. Explications..
  
Anton Corbjin adapte à l’écran un thriller de John le Carré pour un résultat à la fois sobre, passionnant et intense. Il maitrise son sujet, c’est certain. Le résultat s’explique à différents niveaux. Tout d’abord, la réalisation est convaincante. Bien que classique de prime abord, celle-ci se montre aussi dynamique dans les scènes d’action. Le recours aux caméras embarquées et à l’épaule garantissent cette impression « réelle » de l’ensemble. Ici, pas d’édulcorant, rien que du brut ! Le spectateur suit le héros de près et s’embarque à ses côtés dans l’aventure.

Ensuite, nous ne pouvons taire le casting trois étoiles. L’immense Philip Seymour Hoffman inonde l’écran de sa présence en jouant l’agent Bachmann débarqué à Hambourg suite à une affaire qui a mal tourné. On suit donc son personnage impliqué, parfaitement conscient des réalités du milieu dans lequel il évolue, et complètement désabusé. Les seconds couteaux répondent à l’appel d’une fort belle façon avec une équipe allemande talentueuse parmis lesquels : Nina Hoss (Ours d’argent de la meilleure actrice dans « Yella » ; Daniel Brühl ( Rush, le Cinquième pouvoir, 2 days In New York). La suite du casting n’est pas en reste : Willem Dafoe (impérial), Rachel McAdams, Robin Wright (glaciale, comme à son habitude) ; excusez du peu ! Mention spéciale pour Grigoriy Dobrygin dans le rôle de l’immigré Issa Karpov.

Le réalisateur prend plaisir à tracer les limites floues de son film, et ce, pour notre plus grand plaisir. Où est la frontière entre le bien et le mal ? Qui sont les « gentils » ? Les « méchants » le sont-ils vraiment ? Anton Corbjin nous tient en haleine, brouille les cartes et nous interpelle. Peut-on tout se permettre au nom d’un idéal de justice ? Ou du moins au nom d’un idéal que l’on croit juste ? Toutes ces questions renvoient à la complexité de nos sociétés bien sûr, mais aussi à celle du caractère sombre de l’Homme. « La liberté des uns s’arrête là où commence celle des autres » affirmait John Stuart Mill. Rien n’est moins sûr.

Note:
Critique: Stanley 

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