Jane Got A Gun
Jane Hammond est une femme au caractère bien trempé mariée à Bill, l’un des pires bandits de la ville. Lorsque celui-ci se retourne contre son propre clan, les terribles frères Bishop, et qu’il rentre agonisant avec huit balles dans le dos, Jane sait qu’il est maintenant temps pour elle de troquer la robe contre le pantalon et de ressortir son propre pistolet. Le meilleur espoir de Jane n’est autre que son ancien amour Dan Frost, dont la haine envers Bill n’a d’égal que son amour pour Jane.
L’archétype archétypal
du film malade. Telle est, en substance, la conclusion au bout d’une heure
trente-huit de projection. Avec une production houleuse et une promotion
perturbée (la sortie a été repoussée… quatre fois!), le fiasco était quasiment
inévitable. De fait… Retour sur un projet qui, aux yeux du tout-Hollywood,
remplissait toutes les conditions pour devenir un succès et qui se révélera in
fine un échec autant artistique que commercial.
Rétroactes. Le script
de «Jane Got A Gun» avait tout pour lui et figurait même dans la fameuse «black
list» des meilleurs scénarios. Du coup, très vite, le récit a trouvé preneur et
même une tête d’affiche en la personne de Nathalie Portman, également
productrice. Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes. Et
pourtant, l’enfer venait de commencer.
Tout a débuté avec une
démission: celle de Michael Fassbender. La cause ? Incompatibilité
artistique. Entendez plutôt une bonne engueulade. Ce dernier a eu maille à
partir avec la réalisatrice Lynne Ramsay, auteure de l’extraordinaire choc
cannois «We Need To Talk About Kevin». Non contente de voir sa star se faire la
malle, la cinéaste a décidé de plomber encore un peu plus le projet en quittant
le navire à l’aube du tournage. S’en suivra d’ailleurs une bataille juridique
avec les producteurs.
Du coup, Jude Law, qui avait été préalablement appelé en renfort pour soutenir le casting, se désiste aussitôt prétextant qu’il avait signé pour un long métrage mis en scène par Ramsay. Heureusement, alors que la production est reportée et s’enlise dans les augmentations budgétaires, une lueur d’espoir luit au loin. La solution se nomme Bradley Cooper. Mais c’était trop beau. Lui aussi décline l’offre après l’avoir d’abord acceptée. C’est la caca, c'est la cata, c'est la catastrophe…
Issue heureuse, ou
plutôt moins malheureuse que prévue, on évite de peu la débâcle grâce au
secours in extremis d’Ewan McGregor, méconnaissable dans cette fiction, tout
content de retrouver la Princesse Amidala et aussi - surtout ? -
d’endosser le costume du vilain de l’intrigue, lui qui a une bouille d’angelot.
Et pour mettre en boîte cette histoire de vendetta impossible - Portman/western
obligent - c’est Gavin O’Connor (le très bon «Warrior») qui est appelé à la
rescousse.
Autant dire que le
projet était mal en point. Avec un metteur en scène qui débarque à pouf sur un
tournage qui a déjà commencé et, du coup, sans l’avoir préalablement préparé,
l’équipe sur le plateau avait davantage pour mission de sauver les meubles
plutôt que de produire un chef-d’œuvre mémorable qui restera dans les annales
du septième art. Dès lors, peut-on
seulement en vouloir au réalisateur de la déroute artistique ? Car le
constat est sévère: une véritable déconfiture.
Hormis une
reconstitution appliquée, il n’y a strictement rien à sauver dans ce film qui
prend l’eau d’emblée. Entrecoupée de flash-back laborieux tuant tout effet de
montage, le récit déjà vu quatre-vingts mille fois (à peu de chose près) n’est
pas plus digne d’intérêt qu’un épisode bâclé de «La Petite Maison dans la
Prairie». En sus, celui-ci est filmé platement par un «faiseur» dont
l’objectif, noble s’il en est, revient à stopper l’hémorragie, soit terminer le
tournage et limiter les frais pour tout le monde.
Genre remis au goût du
jour et particulièrement à la mode avec les «True Grit», «Django Unchained», «The
Revenant», «The Homesman», «Lone Ranger», «Rango», la série «Hell On
Wheels» etc., «Jane Got A Gun» s’affiche comme le western de trop. Trop
classique, trop prévisible, trop incohérent, trop mal joué (Nathalie Portman en
cow-girl ne convainc qu’à moitié, Joel Edgerton manque de charisme), trop mal
filmé, trop modeste, trop verbeux, trop mélo, trop, trop, trop. Beaucoup trop.
Pourtant, l’ambition
était claire et louable: bousculer un genre plutôt machiste avec un western
crépusculaire réaliste et résolument féministe. Écrivons-le sans détour, la
production a clairement manqué sa cible. On est loin du compte. Pour la forme,
avec ces longs plans panoramiques hyper référencés, n’est pas le grand Sergio
Leone de «Once Upon A Time In The West» qui veut. Pour le fond, c’est attendu
et ça pèche par un cruel manque d’originalités, d’émotions et de
rebondissements. A l’écran, seuls restent les ruines d’un projet mort-né.
Note: ★
Critique: Professeur Grant
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