Manchester By The Sea



Manchester by the Sea nous raconte l’histoire des Chandler, une famille de classe ouvrière, du Massachusetts. Après le décès soudain de son frère Joe (Kyle Chandler), Lee (Casey Affleck) est désigné comme le tuteur de son neveu Patrick (Lucas Hedges). Il se retrouve confronté à un passé tragique qui l’a séparé de sa femme Randi (Michelle Williams) et de la communauté où il est né et a grandi.








Dans la famille Affleck, on demande le cadet: Casey. A l’ombre de son frère, celui-ci éprouve quelques difficultés à se faire un prénom dans la grande famille du septième art. Pourtant, sa filmographie n’a rien de déshonorant. On y retrouve pêle-mêle des œuvres telles que « Good Will Hunting » co-écrit par Matt Damon, « The Assassination of Jesse James by the Coward Robert Ford » pour lequel il fut nominé à l’Oscar, « Gone Baby Gone » réalisé par son frangin ou encore la trilogie « Ocean’s » où celui-ci apparaît comme second couteau aux côtés de George Clooney et Brad Pitt.
Son talent est indéniable, son air de chien battu connu de tous et pourtant, rien n’y fait, Hollywood semble l’ignorer. Le quadragénaire a bien tenté de se faire une deuxième vie d’acteur dans le circuit indé (The Killer Inside Me, Ain’t Them Bodies Saints) cachetonnant toujours çà et là dans des superproductions sans intérêt (Tower Heist, The Finest Hours), mais il lui manque encore ce coup d’éclat qui permettrait de voir sa carrière enfin décoller. Heureusement pour lui, la traversée du désert semble toucher à sa fin. Le script de « Manchester by the Sea » étant tombé dans sa boîte aux lettres.
Placé en pole position pour décrocher l’Oscar du meilleur acteur depuis son trophée glané aux récents Golden Globes, Casey Affleck livre dans ce long métrage une composition inoubliable d’une pudeur et d’une intensité digne des plus grandes prestations. Il y campe Lee, un homme brisé par les aléas de la vie qui, à la mort de son frère, se voit désigné comme le tuteur de son neveu. Un chamboulement qui le confronte au passé tragique qui l’a séparé de sa femme Randi (Michelle Williams, d’une justesse effarante) et de la communauté où il est né et a grandi.
Touchante d’émotion contenue, sa performance se déploie au fil d’une histoire d’une richesse et d’une profondeur rares qui aborde les thèmes du deuil et de la résilience. Kenneth Lonergan met ses qualités d’auteur au service d’un récit dense et habile dans sa manière d’agencer les flash-back, dévoilant au compte-gouttes les éléments tragiques liés au mal-être du héros. L’acuité de sa mise en scène épurée, toute en nuance et en finesse, permet au réalisateur d’éviter l’écueil du pathos et de se débarrasser des facilités du genre comme des trémolos afin de livrer un mélodrame digne, poignant, à mille lieux des productions larmoyantes à faire pleurer dans les chaumières.
Que ce soit dans la gestion des silences, dans l’utilisation parfaite des morceaux de musique classique, par ailleurs savamment choisis, dans l’usage minutieusement dosé des ralentis ou encore dans la manière de dépeindre cette ville du Massachusetts comme une nature morte, Lonergan fait montre d’une virtuosité manifeste. En somme, « Manchester by the Sea », c’est autant la renaissance d’un acteur doué tombé dans l’oubli que la mise sur orbite d’un cinéaste de talent, à la fois scénariste hors pair et metteur en scène chevronné. Bref, « Manchester by the Sea », c’est le cinéma indépendant américain à son meilleur et vous auriez tort de vous en priver.

Note: ★★★★
Critique: Professeur Grant

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