The Lost City of Z



L’histoire vraie de Percival Harrison Fawcett, un des plus grands explorateurs du XXe siècle.
Percy Fawcett est un colonel britannique reconnu et un mari aimant. En 1906, alors qu’il s’apprête à devenir père, la Société géographique royale d'Angleterre lui propose de partir en Amazonie afin de cartographier les frontières entre le Brésil et la Bolivie. Sur place, l’homme se prend de passion pour l’exploration et découvre des traces de ce qu’il pense être une cité perdue très ancienne. De retour en Angleterre, Fawcett n’a de cesse de penser à cette mystérieuse civilisation, tiraillé entre son amour pour sa famille et sa soif d’exploration et de gloire…







I. Contre vents et marées

Il l’aura donc fait. Contre vents et marées, James Gray sera finalement parvenu à mettre son rêve en bobines, soit adapter l’ouvrage historique « The Lost City of Z : A Tale of Deadly Obsession in the Amazon » du journaliste David Grann, mettant ainsi fin au statut d’Arlésienne du projet. Lâché dans les salles obscures dans une totale indifférence, écrasé entre les mastodontes surmarketés « Kong : Skull Island » et « Beauty and the Beast », ce film d’aventure à l’ancienne souffle un vent de fraîcheur dans un contexte de sorties où les produits formatés se bousculent et se chassent les uns les autres : on ne compte plus les remakes, reboot, sequel, prequel, adaptations de jeux vidéo, de bandes dessinées etc. et autres scénarios déjà vu mille fois.

II. Réalisateur cherche Plan B

En refusant la facilité d’une formule toute-faite pour plaire au plus grand nombre (ah, ce sacro-saint grand public !), le cinéaste a été ignoré par tous les traditionnels studios hollywoodiens, prouvant derechef la frilosité des majors à produire des œuvres sortant des sentiers battus. Une réticence symptomatique du marasme économique dans lequel baignent les industries culturelles et qui met à mal la créativité. Il est donc d’autant plus important de soutenir des projets singuliers d’envergure qui voient le jour via le circuit indépendant. L’un des sauveurs possède un nom idoine et n’est pas un inconnu du soleil californien : Plan B, la société de production de Brad Pitt. A l’origine attaché au projet en tant qu’acteur principal, ce dernier a dû laisser sa place au talentueux Charlie Hunnam en raison d’un agenda surchargé.

III. Déterminisme social et quête de respectabilité

Dans d’autres mains, l’histoire vraie de Percival Harrison Fawcett, l’un des grands explorateurs du XXe siècle, aurait pu conduire à une superproduction cousine d’un « Indiana Jones ». Ce n’est pas l’intention de James Gray qui est autant fasciné par la dimension épique de cette destinée que par le portrait sensible de ce hobereau britannique en quête de respectabilité cherchant à tout prix à se soustraire du déterminisme social qui l’emprisonne. Militaire chevronné, mari aimant, père absent et explorateur obstiné, ces différentes facettes sont tour à tour évoquées dans un récit finement écrit, riche en thèmes (l’exploration de terres inconnues, l’égalité des hommes, l’obsession, la paternité, l’honneur) et intelligent dans l’usage des ellipses pour installer le spectateur dans un rythme envoûtant.

IV. De la Grande Pomme à la jungle luxuriante

En racontant cette quête de l’Eldorado, le New-yorkais se situe là où on ne l’attendait pas. Nous ne l’imaginions guère sur le terrain de l’aventure exotique, en pleine jungle primitive et luxuriante, lui qui a fait de l’environnement urbain de la Grande Pomme le cadre exclusif de ses fictions (Two Lovers, We Own The Night, The Yards). Et pourtant, les tourments que vit le protagoniste nous renvoient directement aux affres vécues par d’autres personnages qui parsèment sa filmographie. Ce dernier ne se trouve donc pas en territoire si inconnu. Ainsi, les thuriféraires du metteur en scène - que nous sommes, avouons-le - ne devraient pas se sentir trop dépaysés tandis que les cinéphiles en mal de grandes fresques fleuves (2h20) trouveront leur bonheur.

V. Classicisme suranné et lyrisme ample

Renonçant aux effets de manche à tous crins et aidé d’une distribution irréprochable (Hunnam, parfait ; Miller, sensible et juste ; Pattinson, dans la retenue sans être transparent), le réalisateur signe autant une épopée intime qu’une odyssée fascinante quelque peu vintage (tourné en pellicule). Ainsi, le classicisme intentionnellement suranné de sa mise en scène et les somptueux décors naturels confèrent au film un lyrisme ample sans toutefois ternir le souffle cinématographique, comme lors de la reconstitution saisissante des tranchées de l’épisode sur la Grande Guerre. Enfin, la poésie qui émerge des images, soigneusement mises en lumière par le chef opérateur Darius Khondji (Delicatessen, Se7en, Midnight in Paris), et des plans, composés tels des tableaux, octroie au métrage une splendeur esthétique d’une infinie beauté. En somme, du grand cinéma.


Note:  
Critique: Professeur Grant

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