Alien: Covenant


Les membres d’équipage du vaisseau Covenant, à destination d’une planète située au fin fond de notre galaxie, découvrent ce qu’ils pensent être un paradis encore intouché. Il s’agit en fait d’un monde sombre et dangereux, cachant une menace terrible. Ils vont tout tenter pour s’échapper.






Introduction : la plus inepte des vacuités

« Alien : Covenant » est à la fois à l’image de ses créatures, hybride, et de ses personnages, creux. Un blockbuster improbable mis en boite par un cinéaste peu gêné de dispenser son implacable savoir-faire au service de la plus inepte des vacuités. Au sortir de l’avant-première, un double ressenti émerge : à la fois rassuré de voir que Ridley Scott n’a rien perdu de sa superbe dans sa mise en scène ou dans ses fulgurances gores et terriblement désappointé d’avoir été baladé par un scénario paresseux et bidon qui n’a rien pu tirer des promesses faites à la fin de « Prometheus », prequel ambitieux et frustrant pour le spectateur, qui laissait énormément de questions ouvertes. Ce sentiment mitigé domine.

Le cul entre deux chaises

Dès le prologue, qui réanime Guy Pearce (Peter Weyland) pour l’occasion, on sent le réalisateur britannique tiraillé entre d’une part l’envie de proposer une superproduction qui vaut son pesant de pop-corn et d’autre part sa volonté d’asseoir son métrage dans une mythologie supra qui dépasserait le simple film de genre. Le cul entre deux chaises, en somme. Comme si, refroidi par l’accueil reçu en 2012, Sir Scott avait revu à la baisse ses ambitions sur une civilisation créatrice (les Ingénieurs sont sous-exploités dans le récit : 35 secondes d’apparition dans le métrage et l’affaire est bouclée…) et avait finalement décidé de renouer plus tôt que prévu avec le Xénomorphe.

Entre la resucée et le reboot

Ainsi, à la hussarde, ce dernier piétine ce qu’il avait longuement construit dans « Prometheus » pour revenir à un pur film de science-fiction horrifique. Quitte à ce que celui-ci devienne une sorte de resucée/reboot (très à la mode en ce moment dans l’industrie californienne) de son classique de 1979. Quitte même à détruire une saga naissante pour revenir à une franchise bien établie, mais qui tournait en rond dans ses derniers épisodes. Et c’est en cela que cette nouvelle fiction déçoit. Il y avait véritablement matière à construire quelque chose de différent de la tétralogie « Alien ».

Tout ça… pour ça !

Le metteur en scène s’y est d’ailleurs attelé de nombreuses années pour in fine construire une base neuve et solide (l’origine de l’humanité, rien que ça !) tout en ne reniant pas l’ADN « Alien » afin d’assurer la filiation. Cette démarche avait d’emblée excité les aficionados du « Huitième passager ». D’ailleurs, « Prometheus » n’est pas mauvais en soi, il est simplement hyper frustrant, beaucoup trop soft et vraiment light au regard des enjeux exposés. En clair, il promettait monts et merveilles pour sa suite et, finalement, on se retrouve aujourd’hui avec une histoire bâclée qui se permet d’écraser tout ce qui a été créé jadis pour revenir à ce que l’on a déjà vu dans les années 80 et 90 : un survival. Tout ça… pour ça !

Incohérences à bouche que veux-tu

Là où le premier recelait de mystères jusqu’à atteindre un niveau paroxystique, ce « Covenant » multiplie les révélations, de même que les incohérences avec la saga (la mutation ultra rapide des aliens) et les invraisemblances grotesques (des spationautes sans casque sur une planète inconnue, l’astronef-chantier et sa vitre brisée qui parvient à rejoindre le vaisseau-mère, les comportements idiots des protagonistes en danger…). A tel point que l’univers « Alien » semble ne plus détenir aucun secret et ne plus reposer sur aucune base logique. Il faudra donc se contenter du reste. C’est-à-dire… pas grand-chose. Il ne sert à rien de se passionner pour les personnages car ceux-ci ne disposent d’aucune psychologie. Tous plus demeurés les uns que les autres, il n’y a strictement rien de naturel ou de rationnel dans leur attitude. Quant aux dialogues, particulièrement débiles, les scénaristes ne se sont pas longtemps creusé les méninges.

Un maigre lot de consolation

Cela émis, tout n’est pas à jeter. Sans trop en dévoiler, la partie la plus réussie de la maigrelette intrigue est sans nul doute celle liée aux robots « jumeaux » Walter et David, interprétés par un magistral Michael Fassbender. Contrairement à d’autres qui louent les scènes d’action et d’horreur, sans surprise, beaucoup trop évidentes et pas assez effroyables à notre goût, l’intérêt réside davantage dans cette confrontation entre ces deux androïdes. Le réalisateur de « Blade Runner » parvient à injecter une atmosphère malsaine et suffocante empreinte de mystère dans un environnement hostile. Efficace. Un maigre lot de consolation car, au final, on reste sur notre faim.

Conclusion : un coup d’épée dans l’eau

Ridley Scott n’a pas perdu la main (CGI réussis, moments de science-fiction purs, créatures réalistes - bien qu’on aurait aimé moins d’images de synthèse et plus d’effets mécaniques) et le divertissement est assuré, pour peu qu’on ne réfléchisse pas trop à ce qui nous est montré. Toutefois, on peut regretter son désir de satisfaire les geeks décérébrés de la première heure plutôt que les cinéphiles. Il prend notamment le parti pris de la monstration, là où la suggestion aurait été un choix plus percutant. Ainsi, ce qu’il gagne en spectaculaire, on le perd en épouvante. Et c’est finalement ce que l’on retiendra de cette déconvenue : soit un ersatz réalisé par un metteur en scène qui a volontairement mis en sourdine ses ambitions d’auteur pour contenter l’appétit des aficionados, quitte à renier ses propres qualités artistiques et à saboter l’héritage de la saga. Un coup d’épée dans l’eau !

Note :

Critique : Professeur Grant

 

Autre critique, autre point de vue : 



"Alien: Covenant" est un croisement entre la saga qui valut à Ridley Scott ses lettres de noblesse et son petit frère sortit sur nos écrans en 2012. "Alien: Covenant" réunit-il le meilleur des deux, ou bien le pire ?

La promesse* que fait "Covenant" est grande : faire le pont entre "Prometheus" et "Alien". Soit nous entraîner dans un voyage dont nous ne reviendrons certainement pas indemne. Si "Alien: Covenant" tente de se rapprocher davantage de l'ADN du film de 1979, il tombe dans les mêmes travers que son prédécesseur, sorti en 2012. Explications.

En regardant le dernier long de papa Ridley, le spectateur a l'impression d'assister à un remake gore des "Dix petits nègres", le tout dans l'espace. L'héroïne est constamment sous le feu des projecteurs et semble regarder le reste de l'équipage - à la psychologie exagérément peu travaillée - se faire décimer les uns après les autres.

Sans chercher à le comparer à l’un des membres de sa fratrie, le petit dernier des aliens ne déçoit pas; pour autant que l'on ne s'attarde pas trop à l'un ou l'autre détail peu cohérent. Propulsé par un casting talentueux (avec Waterston et Fassbender en tête de convoi) et une mise en scène inspirée, le film captive. Plus gore, plus angoissant et plus viscéral encore que "Prometheus", "Covenant" offre des hectolitres d'hémoglobine aux amateurs du genre. Visuellement majestueux, le vaisseau Covenant s’envole et se pose sur une planète annoncée comme étant un paradis perdu. "Alien: Paradise Lost" était d'ailleurs le titre originel du film. N'oublions tout de même pas le poème de John Milton remontant à 1667 et traitant de.. l'origine de l'Homme. Le parallèle est évident..

Au final, le réalisateur semble ici davantage étayer la mythologie de son univers créé fin des seventies. Le commandant à l'imagination débordante prend bien soin de répondre à des questions laissées trop longtemps en suspens (D'où viennent les Aliens ? Que sont-ils ? Qui sont les Ingénieurs ? Etc).
Puisque une voire deux autres séquelles ont été annoncées avant de faire le raccord avec "Alien", nous nous disons que le père Scott n'a pas encore perdu le Nord dans l'univers qu'il a créé de toute pièce. La question est de savoir s'il parviendra à mener sa vision à terme, ou s'il passera le flambeau (à l'instar d'un certain George Lucas ?) avant le tomber de rideau final.

Note :
Critique : Goupil

* en anglais, « covenant » veut dire promesse/engagement.

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