Zero Dark Thirty


Le récit de la traque d'Oussama Ben Laden par une unité des forces spéciales américaines...






Disons-le tout de go, Zero Dark Thirty (qui signifie «minuit et demie» en jargon militaire) est tout simplement remarquable. Tout le monde connaît l’issue et pourtant Kathryn Bigelow parvient à maintenir un suspense haletant du début à la fin. La réalisatrice n’a jamais aussi bien maîtrisé le langage cinématographique. Le raid final est, à lui seul, un chef d’œuvre dans l’exécution technique. Formellement brillant! 
La metteuse en scène fait monter l’adrénaline en reproduisant le plus objectivement possible un assaut militaire sous-tension. Pas de triomphalisme, pas de «private joke» après un tir bien senti, pas de beaux gosses en preux héros, pas de propagande va-t-en-guerre, pas d’effets de style dans les combats, pas de sentimentalisme écœurant ni de psychologisme sans intérêt… Bref, aucune fausse note. 
Il n’est pas question de faire du divertissement hollywoodien mais bien de se rapprocher le plus possible d’un cinéma-vérité. Juste des hélicos, des soldats, une mission: trouver et tuer Geronimo, alias Oussama Ben Laden. La caméra, au plus près de l’escouade de militaires, n’est pas là pour vanter les mérites de l’US Army ou faire l’apologie de la violence comme c’est trop souvent le cas dans les films produits par l’industrie cinématographique californienne mais bien pour capter la complexité d’une opération à haut risque.
Superbement documenté, Zero Dark Thirty est surtout un film d’enquête. En réalité, l’incursion dans la forteresse où est reclus Ben Laden ne forme que le climax du métrage. Pendant plus de deux heures, on se passionne pour l’investigation de Maya, brillamment interprété par la jamais décevante Jessica Chastain (The Tree of Life, The Help) qui mérite cent fois son Golden Globe et sa nomination à l’Oscar de la meilleure actrice. C’est grâce à elle et au personnage de Dan, joué par un excellent Jason Clarke, que le long-métrage quitte son aspect documentaire pour prendre des allures de fiction. 
Passionnant de bout en bout, l’ex-femme de James Cameron réussit la gageure de raconter une histoire captivante tout en ne lésinant pas sur les détails, en apparence rébarbatifs, que comprend l’enquête de la CIA. Avec un sens inné du montage, la cinéaste booste son docufiction qui file à toute allure sans aucune longueur nonobstant ses 2h37. C’est que tout transpire la réalité. À aucun moment, le spectateur n'est pris pour un imbécile. Il faut d’ailleurs souligner l’excellent travail fourni par le scénariste et ex-reporter de guerre Mark Boal, salué par l’Académie des Oscars avec une nomination pour le meilleur scénario original.
Austère, aseptisé, maîtrisé, précis. La rigueur intellectuelle que s’est donné l’équipe de ce «reported film» est remarquable. Solidement construit et rondement mené, Zero Dark Thirty est un grand rendez-vous cinéphilique, un tour de force cinématographique et dramatique qui surpasse de loin le précédent métrage de Kathryn Bigelow, l’ultra acclamé et un brin surestimé The Hurt Locker. 

Note: ★★★★
Critique: Professeur Grant

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