Philomena


Irlande, 1952. Philomena Lee, encore adolescente, tombe enceinte. Rejetée par sa famille, elle est envoyée au couvent de Roscrea. En compensation des soins prodigués par les religieuses avant et pendant la naissance, elle travaille à la blanchisserie, et n’est autorisée à voir son fils, Anthony, qu’une heure par jour. À l’âge de trois ans, il lui est arraché pour être adopté par des Américains. Pendant des années, Philomena essaiera de le retrouver.
Quand, cinquante ans plus tard, elle rencontre Martin Sixmith, journaliste désabusé, elle lui raconte son histoire, et ce dernier la persuade de l’accompagner aux Etats-Unis à la recherche d’Anthony.







C’est Byzance! Le cinéphile est des plus gâtés en ce mois de janvier. L’industrie cinématographique lui donne en quelque sorte ses étrennes après une année de bons et loyaux services à visionner une ribambelle de métrages - parfois de piètre qualité - sur grand écran. Après la petite pépite américaine livrée par Martin Scorsese et son ‘Loup de Wall Street’, c’est au tour des Britanniques de nous offrir leur plus beau joyau du moment: ‘Philomena’. Oubliez les innombrables produits doucereux que nous sert Hollywood à tout bout de champs, le cinéma anglais, lui, réhabilite le mélodrame avec brio, celui qui va droit au cœur sans s’encombrer d’artifices tire-larmes préfabriqués avec une armada de violons.
Plus en forme que jamais, Stephen Frears, à qui l’on doit les immanquables ‘Tamara Drewe’ et ‘The Queen’, dresse le portrait de Philomena Lee, une vieille dame au crépuscule de sa vie, qui recherche le fils qu’elle a dû abandonner à la naissance. Tombée enceinte à l’adolescence, cette Irlandaise de statut modeste a été recueillie dans un couvent pour éviter l'anathème. Ce long séjour chez les nonnes devait laver l’opprobre dont elle s’était couverte aux yeux de sa famille. Cinquante ans plus tard, aidé d’un journaliste de la BBC en perte de vitesse, cette catholique remue ciel et terre pour connaître la vie de son fils caché.
Comme susmentionné, ce film inspiré d’une histoire vraie empoigne sans verser dans les trémolos faciles, émeut tout en suscitant la réflexion. Sans cynisme et sans ironie mal placée, ce réquisitoire contre l’église irlandaise nous rappelle l’indispensable ‘The Magdalene Sisters’ de Peter Mullan sur le même sujet. Si ‘Philomena’ sonne juste, c’est surtout grâce à sa distribution. Deux personnages que tout oppose composée par ce qui se fait de mieux dans la crème anglaise. Judi Dench est extraordinaire en mère courage simple mais humble et volontaire au même titre que Steve Coogan, parfait en journaleux snob mais appliqué. Acteur de talent – souvenez-vous de ‘The Trip’ -, ce dernier se révèle également bon scénariste. Son récit fut d'ailleurs primé à la dernière Mostra de Venise et concourt en bonne position à l’Oscar de la meilleure adaptation.
La force de ce script est qu’il dépasse le substrat scénaristique du simple suspense «Va-t-elle retrouver son fils?» pour aborder de front différents thèmes: la religion face à l’athéisme, la foi au quotidien, le pardon et l’inexcusable, le choc des classes sociales, la critique du journalisme avec les «human interest stories» etc. ‘Philomena’ est riche, subtile, profond, drôle et émouvant. Face à tant de qualités, la mollesse de la mise en scène et les quelques flash-backs superfétatoires sont autant de peccadilles qui ne devraient pas vous faire hésiter à vous rendre sans détour chez votre exploitant de salles préféré.
Note: ★★★★
Critique: Professeur Grant

Commentaires

Articles les plus consultés