Astérix: Le Domaine des Dieux


Nous sommes en 50 avant Jésus-Christ; toute la Gaule est occupée par les Romains… Toute? Non! Car un village peuplé d'irréductibles Gaulois résiste encore et toujours à l'envahisseur. Exaspéré par la situation, Jules César décide de changer de tactique: puisque ses armées sont incapables de s’imposer par la force, c’est la civilisation romaine elle-même qui saura  séduire ces barbares Gaulois. Il fait donc construire à côté du village un domaine résidentiel luxueux destiné à des propriétaires romains: «Le Domaine des Dieux». Nos amis gaulois résisteront ils à l’appât du gain et au confort romain? Leur village deviendra-t-il une simple attraction touristique? Astérix et Obélix vont tout faire pour contrecarrer les plans de César.






Là où les fans d’Alexandre Astier l’attendaient au cinéma avec la suite des aventures du roi Arthur de la série culte «Kaamelott», le Lyonnais a pris tout le monde à contre-pied et s’est lancé dans un petit film d’auteur prétentieux avec Isabelle Adjani: «David et Madame Hansen». L’échec est total. Il n’y a quasiment rien à sauver si ce n’est l’une ou l’autre saillie bien sentie comme seul le quadragénaire en a le secret. Remis de cette douloureuse déconvenue, Astier a compris que son truc à lui, c’était de faire rire. S’en suit deux one-man-show et une réponse positive à un film de commande suggéré par les ayants droit de la bande dessinée Astérix. Le projet du «Domaine des Dieux» est lancé. Du coup, la trilogie cinématographique «Kaamelott» est reportée aux calendes grecques. Les aficionados patienteront. 

Par Toutatis! Astierix! - fusion somme toute naturelle entre «Astier» et «Astérix». Bon sang, mais c’est bien sûr! Belle idée que d’associer l’univers décalé de l’auteur-acteur-réalisateur-compositeur-dialoguiste-scénariste-humoriste (Ouf! Oui, oui, tout ça à la fois, c’est que l’homme, en artiste complet, a plus d’une corde à son arc…) avec le monde du petit Gaulois moustachu. Pour les producteurs, l’ambition est claire: retrouver une certaine fraîcheur tout en ne dénaturant pas le matériau de base. Entendez: ne pas froisser l’entourage Gosciny et Uderzo qui avaient plutôt mal accueilli l’adaptation cinématographique – libre de toute contrainte - d’Alain Chabat avec «Mission Cléopâtre». Nouveauté cette fois: pas de film live, ni de dessins animés, mais bien un métrage d’animation en images de synthèse.

Formidable entreprise que voilà! L’animation 3D, toute en rondeur, colle parfaitement aux traits dessinés jadis par Albert Uderzo. A se demander même si ce n’est pas le médium idoine pour conter les aventures de ce petit village d’irréductibles gaulois qui résistent encore et toujours à l’envahisseur romain. Aurait-on enfin trouvé la recette de la potion magique qui permettrait d'associer en toute harmonie le septième et le neuvième art? Là où les films en live motion, avec leurs décors en carton-pâte ultravisible et leurs effets-spéciaux approximatifs voire carrément douteux, peinaient à proposer ne serait-ce qu’une once de crédibilité à l’écran, les images de synthèse, elles, permettent des folies visuelles tout en restant raccord et homogène avec le reste des séquences renforçant ainsi une certaine forme de cohérence visuelle. 

Dans ce travail pointu et ardu de mise en scène, un dénommé Louis Clichy, co-réalisateur avec Alexandre Astier, prend la relève. Formé à l’école Pixar, le frenchy fait montre d’un indéniable talent pour monter les différentes scènes de la bande dessinée. Ce dernier reste relativement fidèle au coup de crayon original et, admettons-le, la conception graphique du métrage est de toute beauté. Cette dernière n’a rien à envier aux canons esthétiques renvoyés par les productions surmarketées des studios d’animation hollywoodiens comme Disney, Pixar, DreamWorks, Blue Sky, Illumination etc. Le réalisateur s’est en outre calqué sur les voix issues d’un casting vocal de luxe pour construire le film. Voyez plutôt: Roger Carel (LA voix emblématique d’Astérix depuis 47 ans), Elie Semoun, Alain Chabat, Florence Foresti, Lorànt Deutsch, Laurent Lafitte… 

Si ce nouvel opus est réussi, c’est aussi parce qu’il fonctionne tant au premier degré qu’au deuxième. Ainsi, petits et grands se délecteront devant les (més-)aventures d’Astérix et Obélix. Gags visuels à profusion, boutades ad libitum, action à foison, émotion à gogo font de ce «Domaine des Dieux» un divertissement familial haut de gamme de tout premier choix pour petits et grands enfants. Mené à un rythme effréné, le film se regarde aussi vite qu’on ne lit une bande dessinée. C’est peut-être là aussi la limite de cette transposition animée qui manque d’enjeux et d’ampleur que pour marquer profondément l’esprit du cinéphile. Le scénario, quoique bien écrit et généreux en humour absurde et allusif, se montre bien trop léger et attendu. 

La surprise aurait été qu’Alexandre Astier, bien que contraint par les producteurs de respecter un tant soit peu le matériau de base, s’affranchisse davantage de l’intrigue principale pour laisser libre court à son imaginaire burlesque. Si l’on reconnaît bien son verbe dans les joutes oratoires savoureuses qui pimentent certaines scènes, on se désole que le film ne soit pas plus imprégné de son univers. On sent très clairement que le créateur de «Kaamelott» a été obligé de freiner ses envies et délires afin de correspondre aux desiderata des producteurs. Ce dernier n’a pas pu se délivrer de cette forme de censure comme l’avait jadis fait Alain Chabat. Cependant, Astier a d’ores et déjà prévenu que si on lui demandait de réaliser une suite, ce serait sur base d’un scénario original. Pas sûr que ce soit accepté… 

Note:
Critique: Professeur Grant

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