The Mummy



Bien qu’elle ait été consciencieusement enterrée dans un tombeau au fin fond d’un insondable désert, une princesse de l’ancienne Égypte, dont le destin lui a été injustement ravi, revient à la vie et va déverser sur notre monde des siècles de rancœurs accumulées et de terreur dépassant l’entendement humain. Des sables du Moyen Orient aux pavés de Londres en passant par les ténébreux labyrinthes d’antiques tombeaux dérobés, La Momie nous transporte dans un monde à la fois terrifiant et merveilleux, peuplé de monstres et de divinités, dépoussiérant au passage un mythe vieux comme le monde.






Une question d’univers

Aujourd’hui, à Hollywood, tout y est question d’univers. Prenez Disney par exemple. Après le « Marvel Cinematic Universe », d’aucuns parlent déjà de l’étape suivante : le Marvel Cosmic Universe. Tout un programme ! Et puis, il y a la franchise « Star Wars » avec le bateau-mère épisodique et ses spin-off (Rogue One l’an passé, Solo l’année prochaine). Autrement dit, Mickey a de quoi voir venir et peut dormir tranquillement sur ses deux grandes oreilles. Les caisses sont et seront encore bien renflouées. Merci pour lui.

En face, chez les frères Warner, on n’a pas à rougir même si le « DC Extended Universe » fait plutôt pâle figure suite aux récentes déconvenues artistiques : le navet Batman V Superman : Dawn of Justice suivi du nanar Suicide Squad… Ça la fout mal ! Wonder Woman devrait normalement redorer le blason de l’écurie. Dans un autre tiroir, les producteurs alimentent également le « MonsterVerse », lequel suit les aventures séparées de King Kong et de Godzilla avant une confrontation dantesque d’ores et déjà prévue à l’horizon 2020.

Chez Fox, on se contente « tranquillou bilou » de la franchise « X-Men » et des séries dérivées (Wolverine, Deadpool…) tandis que Paramount tente cahin-caha d’échafauder quelque chose avec les jouets Hasbro, dont un crossover improbable entre les sagas G.I. Joe et Transformers. Sans oublier d’hypothétiques spin-off… Bah oui, tant qu’on y est ! Et Sony, de son côté, compte toujours exploiter ses droits partagés avec Marvel sur la licence Spiderman. Venom – le Spidey tout de noir vêtu – avec Tom Hardy est actuellement en préparation.

Universal Monsters

Et maintenant, le « Dark Universe ». Enfin maintenant… Pas vraiment. Flashback en automne 2014. Les studios Universal lancent dans les salles obscures son Dracula Untold. Outre son objectif louable d’offrir un aimable divertissement aux plus décérébrés d’entre nous, le but était surtout de construire les fondations d’un univers étendu qui inviterait tous les monstres du catalogue Universal : l’homme invisible, l’étrange créature du lac noir, le fantôme de l’opéra, le bossu de Notre-Dame, le loup-garou, Van Helsing, Frankenstein et sa fiancée. Problème, si les effets spéciaux sont à la hauteur, le scénario, lui, évoque davantage une intrigue de série Z.

Sans surprise, la critique défonce le film, le public l’ignore et du côté des producteurs, on se dit qu’il est plus sage d’étouffer l’affaire et de tout reprendre depuis le début. Et tant pis pour Luke Evans qui portait pourtant si bien les dents de vampire. La cartouche Dracula étant grillée, il fallait trouver un autre monstre suffisamment populaire que pour pouvoir bâtir un environnement cinématographique solide et cohérent. Après le pitoyable troisième volet de la saga The Mummy, piloté par un Rob Cohen en perte de vitesse (un comble pour celui qui est à l’origine de The Fast and The Furious), il était temps de relancer cette franchise. Voilà pourquoi le cadavre embaumé nous revient cette année.

Mon Dieu que c’est mauvais !

« Mon Dieu que c’est mauvais ! », s’exclame-t-on au sortir de la projection. Très mauvais même. Pour bien comprendre, on est face au reboot de la reprise du décalque de la redite du remake du classique d’épouvante de 1932. Vous me suivez toujours ? Difficile d’apporter du neuf dans une tambouille qui a été cuite, recuite et rerecuite ad libitum. Mais, ne dit-on pas que c’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure soupe ? Certes. D’ailleurs, le blockbuster de Stephen Sommers (1999) était une excellente relecture. Un joyeux mélange d’horreur, d’aventure et d’humour, le tout couronné par des effets spéciaux innovants sans être envahissants.

Cette superproduction aux accents fantastiques fut une telle réussite qu’elle a servi de modèle pour cette nouvelle fournée. Le hic, c’est que la recette miracle ne prend pas. Pourquoi ? Tout simplement parce que la production n’envisage rien d’autre que la plus plate des resucées. Là où Sommers faisait du neuf avec de l’ancien dans une mixture savoureusement décalée, le tâcheron Alex Kurtzman, lui, se contente de plagier en faisant un melting-pot de tout ce qu’il a vu dans les différentes versions antérieures. Sans grande originalité. Sans grande cohérence. Sans souci d’homogénéité. Bref, cette Momie est labellisée cent pour cent « sans » !

Dans les limbes de l’oubli

Et du coup, rien ne fonctionne. On a de l’action digne d’un volet de Mission Impossible, de l’humour pas drôle voire même affligeant, des notes horrifiques aussi effrayantes qu’un épisode de Franklin la tortue, une intrigue et des scènes vues et revues des milliards de fois avec, çà et là, des rebondissements téléphonés et, in fine, une mise en scène répétitive qui n’impressionne guère. Et c’est peut-être là où le bât blesse. Confier la réalisation à un producteur-scénariste, c’est rarement une bonne idée. Surtout au regard de l’ampleur de la production. Chacun doit rester dans son rôle. La gestion, c’est une chose. L’art, c’en est une autre.

Enfin, à force d’installer les éléments du « Dark Universe », le film vaut finalement moins pour lui-même que pour l’univers partagé qu’il essaye de construire. Ainsi, l’incrustation du tandem Dr. Jekyll / Mr. Hyde (Russell Crowe fait le job sans démériter) est laborieuse et doit se voir uniquement dans l’optique d’annoncer et de relier les autres métrages à venir dans cet environnement monstrueux. Quant à l’inoxydable Tom Cruise, il fait… du Tom Cruise et, dans ce rôle-là, il est plutôt bon. Le problème, c’est qu’il n’est pas du tout à sa place. L’éternel golden boy de la machine californienne s’est vraisemblablement trompé de tournage… Aux dernières nouvelles, ce dernier a retrouvé son chemin… sur le plateau de « M:I 6 ». Naturellement !

Il n’y a donc pas grand-chose à retenir de cette daube qui finira par tomber dans les limbes de l’oubli. Si ce n’est peut-être qu’il est grand temps pour les majors d’en finir avec le recyclage, d’arrêter les formules toutes faites « prêt à tourner » et d’oser davantage les scénarios originaux.

Note :

Critique : Professeur Grant

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