Isle of Dogs

Lorsqu'une épidémie de grippe canine envahit la ville japonaise de Megasaki et menace de contaminer les hommes, le maire ordonne la mise en quarantaine de tous les chiens. L'île poubelle devient : l'Île aux Chiens. Un jeune garçon de 12 ans, Atari, se rend sur place à la recherche de son chien perdu, Spots. C'est alors qu'il fait la découverte, à l'aide d'une meute de cinq chiens, d'une conspiration qui menace la ville. 



Qu’il s’agisse de nous faire revivre notre adolescence derrière les lunettes d’un certain Max Fischer, de nous inviter à la table de la famille la plus dysfonctionnelle d’Harlem, ou encore de nous faire participer à un camp scout à l’allure de chasse à l’homme ; Wes Anderson n’a pas son pareil pour narrer des histoires singulières.
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Neuvième film du cinéaste, « Isle of Dogs » est son deuxième film d’animation. Huit ans après l’inspiré et le coloré « Fantastic Mr Fox », Anderson entonne un dithyrambe surprenant en l’honneur du meilleur ami de l’homme.

Film d’animation en stop-motion, « Isle of Dogs » a des allures de film pour enfants. Des allures seulement puisque les métaphores politiques (un leader né dans le privilège qui divise, exacerbe les tensions et tient des discours haineux) et autres références opaques à la culture du pays du Soleil-levant apparaissent en filigrane. Le combat sumo, les sushi, le théâtre kabuki, la poésie haiku, les tambours taiko, etc. La culture nipponne est ici analysée et surtout, mise à l’honneur. Certains réalisateurs mythiques comme Akira Kurosawa (« Seven Samurai », « Kagemusha ») et Hayao Miyazaki (co-fondateur du studio Ghibli) sont ici mis à l’honneur. D’autres artistes célèbres tels que Katsushika Hokusai (l’artiste derrière « La Grande Vague de Kanagawa ») et Utagawa Hiroshige (dessinateur connu pour ses estampes du mont Fuji) bénéficient de clins d’œil. Un grand film ne peut toutefois pas se limiter à la parodie..

En termes d’animation, « Isle of Dogs » fait encore mieux que « Fantastic Mr Fox ». Triomphe d’inventivité, le film regorge de détails microscopiques. Les fans de la première heure seront comblé-e-s et réclameront sans doute une seconde projection !

Tous les ingrédients de l’univers Wesandersonien sont là : le maniérisme du réalisateur, son obsession pour la symétrie, l'usage intensif du travelling horizontal, une préférence pour les couleurs pastel, un goût pour l’humour pince-sans-rire, ainsi qu'un amour pour la musique vintage (The West Coast Pop Art Experimental Band).

Pour l’écriture du scénario, Anderson s’entoure de ses amis Roman Coppola et Jason Schwartzman. Nul besoin de tenir ses acolytes en laisse tellement ils semblent sur la même longueur d’ondes que le cinéaste. Il s’adjoint cette fois les services de Kunichi Nomura, qui agit probablement comme une sorte de consultant culturel.
愛犬

Le casting est à s’en lécher les babines. Rex (Edward Norton), King (Bob Balaban), Boss (Bill Muray), Duke (Jeff Goldblum) et Chief (Bryan Cranston) forment une meute attachante qui parvient sans mal à nous captiver durant cette promenade de 100 minutes. Toute la beauté de l’animation réside en le talent de l’équipe d’Anderson pour animer chaque canis lupus familiaris à la perfection. Elle parvient également à transformer un endroit lugubre (une île servant de décharge) en un lieu attrayant. Il ne manquait plus que la patte d’Alexandre Desplat pour divertir notre ouïe.
日本人

« Isle of Dogs » n’échappe cependant pas à la fausse note. Nous regrettons en effet la limite plutôt mince entre l’appréciation et l’appropriation culturelle. Quand les habitants de Megasaki parlent japonais, ils ne sont pas sous-titrés. Pire : les chiens - sensés être japonais - parlent un anglais américain ! Les japonais deviennent dès lors étrangers dans leur propre pays ! Et puis il y a Tracy Walker (Greta Gerwig), cette étudiante d’échange américaine qui mènera la révolution et conscientisera les japonais sur la corruption présente à Megasaki. Dommage que ce rôle ne fut pas donné à un-e habitant-e de la mégapole.
名作

Ce n’est pas un hasard si « Isle of Dogs » se prononce comme « I love dogs ». Si le film ne vous donne pas l’envie d’adopter un chien, il confirme que le chien est bel et bien le meilleur ami de l’homme. Et Wes Anderson de se hisser comme le meilleur ami des chiens. Aux confins du septième art et de l’œuvre d’art, le travail de Wes Anderson continue de fasciner. « Isle of Dogs » a définitivement du chien et mérite assurément une sortie cinéma !

Note :
Critique : Goupil

Autre critique, autre point de vue - « Isle of Dogs » vu par le Professeur Grant :

I. Fantastic Mr. Anderson

Près de dix ans après les aventures du goupil « Fantastic Mr. Fox », Wes Anderson renoue avec l’animation en stop-motion pour le projet « Isle of Dogs ». Il s’agit derechef d’une histoire qui tourne autour des animaux. Des chiens plus particulièrement, lesquels sont bannis d’une ville fictive du pays du Soleil-Levant et mis en quarantaine sur une île aux allures de décharge à ciel ouvert. Selon les autorités japonaises, les canidés seraient à l’origine d’une épidémie de grippe. Seulement, un jeune garçon ne l’entend pas de cette oreille. Peiné d’avoir perdu son fidèle compagnon, il se met à sa recherche, quitte à devoir se perdre dans les recoins interlopes de ce dépotoir insulaire. Avec l’aide de cinq clebs rencontrés in situ, les biens nommés Chief, Rex, King, Boss et Duke, ce dernier va bientôt mettre au grand jour un vaste complot. Une conspiration qui impliquerait directement son père adoptif, le maire de la cité.

II. Un style inimitable

Pas de doute, on est bien chez le dandy texan. Dès les premières minutes, on retrouve son univers si singulier, son style visuel affirmé et inimitable (symétrie, travellings horizontaux…), sa créativité sans borne, sa mélancolie douce-amère et son indécrottable maniérisme technique. Comme à l’accoutumée, notre gandin nous présente une galerie de personnages atypiques pris dans une odyssée endiablée où l’absurde se savoure à chaque plan, notamment au travers de lignes de dialogues exquises, lesquelles sont transcendées par un casting vocal impressionnant. Lisez plutôt : Bryan Cranston, Edward Norton, Bill Murray, Jeff Goldblum, Bob Balaban, Hervey Keitel chez les messieurs ; Scarlett Johansson, Frances McDormand, Tilda Swinton, Greta Gerwig, Anjelica Huston, Yoko Ono chez les femmes. Vous l’aurez compris, et pour d’autres raisons encore, il est inconcevable de voir ce métrage en version française !

III. Déficit émotionnel

Si d’ordinaire la mécanique un peu trop huilée de Wes Anderson tend à empêcher les émotions d’émerger, elle atteint un niveau paroxysmique dans ses films d’animation en volume. Ainsi, à l’instar de son « Fantastic Mr. Fox », on éprouve quelques difficultés à s’attacher aux (trop) nombreux personnages. La raison ? Ces figurines animées ne dégagent rien nonobstant les efforts fournis par une distribution vocale en tout point parfaite. Un effet amplifié par le style plutôt froid et distancié du metteur en scène. Une impression que l’on retrouve moins dans ses métrages live action, car les comédiens, véritables poupées de chair, parviennent à colmater ce déficit émotionnel par un jeu plus subtil et moins automatique que les marionnettes manipulées par des artisans. On regrettera encore quelques longueurs notamment durant le dernier acte. Mais rassurez-vous, « Isle of Dogs » reste un « Wes Anderson » hautement recommandable.
Alors, régalez-vous !

Note : 
Critique : Professeur Grant

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