Le Jeu


Le temps d’un diner, des couples d’amis décident de jouer à un « jeu » : chacun doit poser son téléphone portable au milieu de la table et chaque SMS, appel téléphonique, mail, message Facebook, etc. devra être partagé avec les autres. Il ne faudra pas attendre bien longtemps pour que ce « jeu » se transforme en cauchemar.






Le temps d’un dîner

Le concept de base est très simple. Le temps d’un dîner, des couples d’amis décident de s’amuser avec un jeu un peu particulier : chacun est invité à déposer son téléphone portable au milieu de la table à manger et chaque SMS, appel téléphonique, mail, message Facebook, etc. devra être partagé au vu et au su de tous. Pour le meilleur… mais surtout pour le pire ! Qui parviendra à tirer son épingle du… « Jeu » ? Car il ne faudra pas attendre bien longtemps pour que la soirée parte en vrille et se transforme en véritable cauchemar voire en pugilat. Ou quand les « petits mensonges entre amis » se règlent dans un appartement métamorphosé en champ de bataille. « Vivons heureux, vivons cachés », comme dirait l’autre…

A table !

A table, on retrouve un casting hétéroclite de têtes bien connues du cinéma hexagonal : notre Stéphane De Groodt national, Vincent Elbaz, Roschdy Zem, Grégory Gadebois chez les hommes ; Bérénice Bejo, Suzanne Clément, Doria Tillier chez les femmes. Tous excellent en jouant une partition sans fausse note, bien aidés par des dialogues ciselés qui claquent dans leur bouche. Ils peuvent remercier Fred Cavayé, qui se rachète ici une conduite après le mi-figue mi-raisin « Radin ! » avec Dany Boon. Ce dernier a parfaitement réussi l’adaptation du film italien « Perfetti Sconosciuti ». Avec un brin de cynisme dans le geste, il croque une génération lasse d’une vie répétitive et morne qui préfère fuir ses problèmes conjugaux, familiaux et amicaux plutôt que de les affronter.

La cuisine est bonne

Adultère, trahison, frustration, petitesses, coups fourrés, non-dits, faux-semblants, tout est déballé au grand jour via ce petit objet intime en apparence inoffensif qu’est le smartphone, source de nombreux malheurs dans notre société. D’ailleurs, ce huis clos comico-dramatique parvient astucieusement à marier la fameuse série « Black Mirror », pour sa critique virulente des nouvelles technologies de l’information et de la communication qui avilissent les êtres humains, avec le film « Le Prénom », pour sa façon de montrer des proches se déchirer sur des secrets, mensonges et autres hypocrisies. Cette association audacieuse est cuisinée avec une dextérité remarquable qui s’apprécie tant dans la qualité d’écriture que dans la mise en scène.

Salé et acide

Les rebondissements ingénieux, quoique certains téléphonés - sans mauvais jeu de mots -, assimilés au montage dynamique, parviennent à nous captiver jusqu’au dénouement. C’est que Fred Cavayé dose savamment son scénario vaudevillesque pour que le rythme monte crescendo. Ainsi, d’une comédie de boulevard pépère, le film vire petit à petit dans la tragicomédie, au fil des révélations et autres retournements de situation. Et c’est là qu’on remarque tout le savoir-faire du réalisateur qui a officié auparavant dans des thrillers (Pour Elle, A bout portant, Mea Culpa). Ce dernier évite l’écueil du théâtre filmé avec une réalisation pêchue qui capte aussi bien le sel des moments de comédie que l’acidité des instants de malaise. C’est efficace tant il ne laisse aucun répit aux spectateurs.

Bon appétit !

Voici donc un divertissement millimétré. Ludique et burlesque, ironique et sadique, certes parfois facile et abracadabrant, « Le Jeu » s’affiche in fine comme une dramédie réussie et jubilatoire qui mérite le déplacement tant pour son récit original que pour le jeu de ses acteurs.

Note : 

Critique : Professeur Grant

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