Doctor Strange in the Multiverse of Madness

 


Dans ce nouveau film Marvel Studios, l’univers cinématographique Marvel déverrouille et repousse les limites du multivers encore plus loin. Voyagez dans l’inconnu avec Doctor Strange, qui avec l’aide d’anciens et de nouveaux alliés mystiques, traverse les réalités hallucinantes et dangereuses du multivers pour affronter un nouvel adversaire mystérieux.



I. L’étrange Docteur Raimi

Il y a vingt ans, Sam Raimi s’incrustait avec éclat dans l’univers super-héroïque. Rétroactes : juin 2002. « Spiderman » débarque dans les salles obscures, faisant suite à l’adoubement, deux années plus tôt, du grand public pour le « X-Men » de Bryan Singer. Ces deux superproductions maousses signaient le retour en grâce d’un genre tombé en désuétude durant les années nonante. Et sans le vouloir, le cinéaste derrière l’homme-araignée allait poser les jalons d’une formule d’industrialisation massive : action débridée, humour goguenard, ambiance pop et effets spéciaux renversants. Le blockbuster connut un succès sans précédent, un retentissement tel que Sony commanda rapidement une trilogie à son auteur, lequel s’exécuta prestement avec un deuxième opus de très belle facture et un troisième volet impossible à réhabiliter, nonobstant toute la bonne volonté du monde.

II. Quelle place pour Uncle Sam dans le MCU ?

Entretemps, le Marvel Cinematic Universe (MCU), avec son armada d’Avengers, s’est déployé pour le plus grand bonheur de la geekosphère tandis que notre Uncle Sam s’est quelque peu fourvoyé dans « Le Monde Fantastique d’Oz ». Suite au départ inattendu du réalisateur de « Doctor Strange » Scott Derrickson pour différends artistiques, la place laissée vacante pour mettre en scène la suite des aventures du sorcier est rapidement saisie par l’ami Raimi, accueilli comme le messie par des cinéphiles intrigués par l’arrivée surprise d’un auteur expérimenté chez Marvel, studio conservateur plutôt intéressé par le profit, heuu… profil du « yes man » de service. Si le tapis rouge lui est déroulé, il reste cette question posée en filigrane : la touche singulière d’un artiste peut-elle s’exprimer dans un carcan aussi strict et étroit que celui imposé par le MCU ? En clair, le sexagénaire allait-il pouvoir s’affranchir de la sujétion à l’ogre Kevin Feige, patron de la poule aux œufs d’or de Disney ?

III. Du multiverse, certes, mais si peu de madness

Réponse : oui. Il ne fait aucun doute là-dessus. Formellement, ce « Multiverse of Madness » porte bien la griffe de son créateur. Un miracle quand on voit la manière dont les métrages Marvel sont usinés, soit une pure déclinaison du taylorisme dans leur fabrication. En dépit d’un cahier des charges des plus restrictifs, le papa de la licence « Evil Dead » parvient à tirer son épingle du jeu avec des moments glauques, à la lisière du gore, dans lesquels l’hémoglobine coule à flots. Evidemment, le déviant qui sommeille en nous en demande davantage et ne se montre clairement pas rassasié avec une production qui reste malgré tout très sage. On aurait tellement aimé que le cinéaste pousse le curseur encore plus loin, que sa sequel soit aussi folle que son titre, au final un brin mensonger. Un chouïa de multiverse, certes, mais si peu de madness au bout du compte. Ne soyons pas dupes, avec son bras tendu sur le frein à main, il n’est pas en pleine possession de ses moyens.

IV. Ecriture aux fraises

Quoiqu’il en soit, le réalisateur a le feu sacré et réussit à imprimer sa patte sur la pellicule. Une singularité rare dans la saga Marvel et donc bienvenue pour le cinéphile. Plans inventifs, séquences hallucinées, trouvailles visuelles, gimmicks de montage, fulgurances horrifiques du plus bel effet, la mise en scène est soignée. Dommage qu’il n’en va pas de même pour le récit. Bardé de scènes d’action emballées d’effets numériques pas toujours réussis, contrairement au premier épisode, cette nouvelle aventure solo du Maître des Arts Mystique perd son spectateur dès que ses (trop nombreux) personnages sans relief commencent à déblatérer. La faute à un manque d’écriture : des lignes de dialogues d’une niaiserie abyssale et, plus globalement, un scénario bancal aux enjeux sans queue ni tête. Même les caméos, maladroitement intégrés à l’histoire, tombent comme un cheveu sur la soupe.

V. On n’a d’yeux que pour Elizabeth Olsen

Divertissement pop, et par instant jubilatoire, filant à bride abattue, ce vingt-huitième film estampillé MCU offrira un roller coaster de haute volée pour tous les inconditionnels de l’écurie Marvel. Les autres y verront soit une superproduction généreuse en morceaux de bravoure, soit un énième blockbuster succombant à la surenchère avec une succession d’affrontements dantesques. Mais tout le monde s’entendra sur le fait qu’Elizabeth Olsen est extraordinaire dans le rôle casse-gueule de Scarlet Witch. A la fois caution émotion et garante de frissons, l’actrice vole la vedette à ses collègues, au point que Wanda, qui a connu un bel arc narratif depuis sa première apparition dans « Avengers : Age of Ultron », en deviendrait presque le personnage le plus abouti de la franchise. Enfin, comme à l’accoutumée chez Marvel, restez pour la scène post-générique. Et, venez plus tôt au cinéma également. Car, in fine, ce qu'on retient le plus de ce « Doctor Strange in The Multiverse of Madness », c'est… la bande-annonce d’Avatar 2 (!)

Note : 

Critique : Professeur Grant

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