Thor: Love and Thunder
Alors que Thor est en pleine introspection et en quête de sérénité, sa retraite est interrompue par un tueur galactique connu sous le nom de Gorr, qui s’est donné pour mission d’exterminer tous les dieux. Pour affronter cette menace, Thor demande l’aide de Valkyrie, de Korg et de son ex-petite amie Jane Foster, qui, à sa grande surprise, manie inexplicablement son puissant marteau, le Mjolnir. Ensemble, ils se lancent dans une dangereuse aventure cosmique pour comprendre les motivations qui poussent Gorr à la vengeance et l’arrêter avant qu’il ne soit trop tard.
I. A Thor et à travers
Marvel. Encore et
toujours. A Thor et à travers. Premier super-héros de la Maison des idées à
recevoir un quatrième tour de manège en « stand alone », comme on dit dans
le jargon cinématographique, le fils d’Odin s’acoquine derechef avec Taika
Waititi pour mettre en scène ses nouvelles aventures intergalactiques. Si, avec
« Ragnarok », le Néo-Zélandais apportait un brin de légèreté ainsi qu’une touche
de second degré bienvenue dans un Marvel Cinematic Universe (MCU) qui
commençait sérieusement à pédaler dans la semoule tout en se prenant trop au
sérieux, ce « Love and Thunder » est l’opus de trop. Celui qui bascule sans ménagement dans
l’outrance, saute à pieds joints dans la surenchère et ne se prend plus du
tout au sérieux, au point de verser totalement dans l’auto-parodie. Le
vingt-neuvième film du MCU se vautre dans l’inconséquence narrative et
s’éloigne encore davantage du ton proposé dans le reste de la licence. Plus
fou, plus absurde, plus grotesque, plus inepte… Bref, plus ! Mais aussi moins.
Moins cohérent, moins harmonieux, moins original. En somme, le quadragénaire se
contente de pousser le curseur encore plus loin, sans rien apporter de neuf à l’univers
de l'Asgardien.
II. Le
côté clair de la farce
Ce qui intéresse le papa
de « Jojo Rabbit », ce ne sont pas les prouesses de sauveur du dieu du
tonnerre, mais la manière dont l’avenger
peut se ridiculiser devant une audience. Devenu le bouffon de service de la
galaxie, Thor le balourd s’avère aussi fascinant que risible. Mais contre toute
attente, cette approche héroï-comique fonctionne. Grâce à l'abattage de Chris Hemsworth, à la
lisière du cabotinage, mais
aussi grâce à la vis comica de Taika
Waititi et son sens consommé du décalage. Comique de situation, punchlines désopilantes, gags saugrenus,
œillades complices, caméos rigolos à gogo (Matt Damon, Sam Neill,
Melissa McCarthy…) ce dernier, en roue libre, ne se refuse rien, ne s’impose aucune limite, se
permet toutes les énormités burlesques et réussit plusieurs fois à titiller
nos zygomatiques. Le métrage fait alors naître un étrange sentiment chez le spectateur, à la fois amusé par la pantalonnade et agacé par la tonalité choisie, celle-là même qui rend futiles tous les
enjeux dramaturgiques. Impossible de s’émouvoir des péripéties qui lui sont
contées, le réalisateur tuant dans l’œuf chaque élan dramatique mis en place.
Le cinéaste fait ainsi l’expérience de sa propre contradiction : vouloir
absolument raconter deux histoires particulièrement sombres (à savoir la
maladie de Jane Foster, l’ex-girlfriend de Thor, et la destinée funeste du
némésis Gorr, aka « Le Boucher des Dieux ») et en même temps annihiler cette
substance tragique par un ton rigolard et facétieux.
III. Bouillabaisse numérique
Sur le plan esthétique,
ce blockbuster déçoit également. Waititi échoue à donner de l’ampleur à son space opera et propose finalement très peu d’idées de mise en scène, se reposant
uniquement sur son envie de jouer la carte chromatique. C’est bariolé,
certes, mais qu’est-ce que c’est criard et hideux ! Nos pupilles saignent
encore. Au menu : une bouillabaisse numérique aux images de synthèse
indigestes. Les incrustations 3D sont, à ce titre, immondes. Un résultat formel
aux antipodes des standards cinématographiques actuels. Par ailleurs, le
montage aussi pose un énorme problème : le réalisateur expédie chaque scène, laissant nullement l’atmosphère s’installer, les personnages respirer et l’émotion
surgir. En témoigne l’assaut surcuté
sur New Asgard mené par Gorr (Christian Bale, à nouveau métamorphosé, s’en sort
bien). Une séquence au potentiel immense qui aurait pu donner la chair de poule. Mais
non. C’est filmé platement (réalisation brouillonne, peu de profondeur de
champ, carences créatives) et monté maladroitement. Même la scène de retrouvailles entre Thor et
Jane Foster (Natalie Portman fait le job) s’avère bâclée. Or, s’il y avait bien
un moment à réussir, c’était bien celui-là. L’héroïne aurait pu devenir le
véritable moteur de l’intrigue si le scénario s’était montré plus respectueux
envers le personnage. Le récit éprouve toutes les difficultés du monde à la
rendre intéressante en fuyant systématiquement les éléments de son parcours qui
expliquent son étrange chrysalide en Mighty Thor.
Qu’en penser au bout du
compte ? De bonnes idées par-ci (l’impressionnante séquence en noir et blanc
très arty), de mauvaises par-là (le combat avec les mioches kidnappés,
seriously ?), le constat est sans appel : « Thor : Love and Tunder » est un
épisode filler inégal. Un
divertissement pop, bigarré et décomplexé qui se fout de tout, en ce compris de
lui-même. Drôle à défaut d’être spectaculaire, énergique mais terriblement
superficiel, ce quatrième volet vaut le coup d’œil si, et uniquement si, vous êtes un
inconditionnel de la constellation Marvel.
Note : ★★
Critique : Professeur Grant
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