No One Will Save You
Brynn Adams est une jeune femme créative et talentueuse rejetée par sa communauté. Solitaire et toujours optimiste, la jeune femme trouve son réconfort entre les murs de la maison où elle a grandi. Une nuit, elle est réveillée par d’étranges bruits provenant d'intrus manifestement non humains. Commence alors un éprouvant face-à-face entre Brynn et une foule de créatures extraterrestres qui, en plus de menacer son futur, l’amèneront à affronter son passé.
Entrez dans la quatrième dimension
Dans le genre « home
invasion », No One Will Save You
est un film qui se défend plutôt bien. Avec son allure de petite série b sans
prétention sortie de nulle part, cet objet de science-fiction, à mi-chemin
entre un épisode de la série culte The
Twilight Zone et le sous-coté Signs
signé M. Night Shyamalan, possède de nombreux arguments à faire valoir. Et pourtant,
il n’a pas eu droit à une sortie au cinéma. Une stratégie de distribution contestable
tant ses qualités abondent. Comme pour l’excellent Prey, le prequel de la
saga Predator sorti l’année passée et
avec qui il partage de nombreuses similitudes, « Traquée », en
version française, a timidement atterri sur la plateforme de streaming Disney+.
Dommage car cette petite curiosité SF méritait amplement une découverte dans
les salles obscures.
Suggestion et monstration
L’argument principal qui
doit vous convaincre de le visionner dare-dare sur votre plus grand écran : sa
générosité débordante. Le réalisateur et scénariste Brian Duffield, déjà au
stylo sur les sympathiques The Babysitter
et Love & Monsters du streamer
concurrent au N rouge, synthétise les meilleurs concepts d’invasions
extraterrestres dans un scénario efficace qui joue malicieusement avec les
attentes de l’audience. Si dans un premier temps, le trentenaire mise sur la
suggestion pour faire monter la tension, très vite, ce dernier lève le voile
sur ces visiteurs venus d’ailleurs, tout en veillant à maintenir le malaise
chez le spectateur sous pression, par le biais d’une mise en scène percutante. Et
cela étonne car, d’ordinaire, les productions fantastiques se gardent bien de présenter
d’emblée leurs créatures monstrueuses (le squale dans Jaws, le xénomorphe d’Alien).
Rencontre du troisième type
La surprise n’en est que plus
forte lors de la révélation, la fameuse rencontre du troisième type ayant lieu
dès les dix premières minutes. A ce propos, le métrage demeure parfaitement
raccord avec sa bande-annonce et son synopsis qui ne jouent pas du tout la
carte du mystère. L’extraterrestre est dit, montré, assumé. Au centre de
l’histoire ? Brynn Adams, une jeune femme créative et talentueuse rejetée
par sa communauté. Solitaire et toujours optimiste, celle-ci trouve son
réconfort entre les murs de la maison où elle a grandi. Une nuit, elle est
réveillée par d’étranges bruits. Cette dernière distingue vaguement une
silhouette humaine. Commence alors un éprouvant jeu du chat et de la souris
entre Brynn et des envahisseurs qui, en plus de menacer son futur, l’amèneront
à affronter son passé.
Univers de référence
Autre bon point à mettre à
l’actif de cet OFNI (objet filmique non identifié) : son esthétique. A
nouveau, le metteur en scène s’amuse avec l’inconscient collectif et notre
univers de référence : la soucoupe volante, le halo lumineux. Quant au petit bonhomme vert, il s’agit du
stéréotype du petit-gris classique tel qu’on le caricature à chaque fois :
un être humanoïde avec une tête ovale, des grands yeux, une petite bouche, des
doigts kilométriques… Bref, tout droit sorti de l’affaire de Roswell. On a beau
l’avoir vu des milliers de fois dans tout type d’œuvres culturelles, le rendu désuet
fait mouche. Par ailleurs, le cinéaste fait montre d’un certain savoir-faire
dans l’art de la mise en scène. Que ce soit dans la partie de cache-cache ou
dans le climax avec des séquences éthérées du plus bel effet, la réalisation de
Brian Duffield impressionne. A tel point qu’on lui pardonne certains effets
numériques malheureux.
Mute
Et que dire de son concept qui
rappelle A Quiet Place ! En
phase avec l’histoire et son protagoniste, le récit ne propose quasiment aucune
ligne de dialogue. Bien plus qu’un futile gimmick narratif ou qu’un simple
effet de style, ce parti-pris surprenant apparaît comme une évidence au regard
de l’intrigue. Maîtrisant parfaitement la grammaire cinématographique, le
réalisateur s’appuie sur le pouvoir de l’image et sa science du montage pour
raconter visuellement son histoire, mais aussi sur la puissance de
l’environnement sonore pour flanquer une peur panique au tout-regardant, avec
un travail remarquable accompli tant au niveau du sound design que sur le plan musical. Signalons à ce propos la solide
composition de Joseph Trapanese, laquelle traduit le chaos dans lequel évolue
l’héroïne.
Kaitlyn Dever, de révélation à confirmation
Mais toute l’ingénierie du
septième art ne serait rien sans une comédienne talentueuse capable de porter sur
ses épaules un dispositif technique aussi contraignant. La production a eu le
nez fin en embauchant Kaitlyn Dever, vue précédemment dans la brillante série Dopesick. Seule face à des repères
inertes, la jeune américaine de 26 ans laisse libre cours à son imagination et
à sa créativité pour se propulser dans un environnement hostile et embarquer le
spectateur avec elle. Résultat : on y croit ! Une sacrée gageure pour
l’actrice qui dévoile ici toute l’étendue de son talent avec un rôle pourtant
pas évident à assumer. En l’absence de dialogues, tout passe par le corps, la
gestuelle, les expressions faciales : peur, doutes, incompréhension,
soulagement… Une performance muette mais éloquente qui démontre une palette de
jeu impressionnante. Il nous tarde de la retrouver.
Pour une suite, peut-être ?
Note : ★★★
Critique : Professeur Grant
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