The Substance
Avez-vous déjà rêvé d’une meilleure version de vous-même ? Vous devriez essayer ce nouveau produit :
THE SUBSTANCE
Il a changé ma vie. Il permet de générer une autre version de vous-même, plus jeune, plus belle, plus parfaite.
Respectez les instructions :
VOUS ACTIVEZ une seule fois
VOUS STABILISEZ chaque jour
VOUS PERMUTEZ tous les sept jours sans exception.
Il suffit de partager le temps. C’est si simple, qu’est-ce qui pourrait mal tourner ?
Voilà que débarque chez nous un nouveau film estampillé « body horror ». Un « body horror », vous dites ? C’est un sous-genre de l’horreur où les protagonistes subissent des sévices brutaux, mutilations, transformations ou encore des contaminations. À l’affiche, l’une des plus grandes actrices des années 1990s est accompagnée d'une étoile montante qui est sur toutes les lèvres depuis son passage chez Tarantino. Âmes sensibles, s'abstenir !
Demi Moore et Margaret Qualley, la fille d’Andie Macdowell, pourraient être mère et fille dans la vie. Dans « The Substance », elles jouent un même rôle. Les deux facettes d'une même personne s'alternent donc dans cette histoire. Elles sont si convaincantes qu’elles devraient logiquement être reconnues – si pas récompensées – aux Oscar en mars prochain. Elles donnent toutes deux de leur personne en se dénudant pour les besoins du film. Demi Moore semble se réinventer dans le rôle de cette femme victime de son hubris. Margaret dévoile une palette d’émotions ébouriffante. Dennis Quaid est quant à lui répugnant dans un rôle à contre-emploi au vu de son étiquette de good guy.
Quand « Requiem for A Dream » rencontre « The Fly », cela donne « The Substance ». Coralie Fargeat (après « Revenge » en 2017) signe ici un film stylé empruntant beaucoup aux classiques du genre. Elle parvient toutefois à instiller de la peur au sein des plus intrépides cinéphiles. Le film étonne dans ses deux premiers actes avant de déranger grandement dans sa dernière partie. En outre, nous aurions aimé un peu plus de substance, dans le fond (une critique plus acerbe vis-à-vis l’âgisme régnant à Hollywood), comme dans la forme (cette utilisation du male gaze est incompréhensible pour ce long métrage signé par une cinéaste).
Fable hyperréaliste accompagnée d’un festival d’effets pratiques réussis et récompensée à Cannes, « The Substance » rassasiera à coup sûr les aficionados du genre et révulsera les personnes curieuses ayant poussé la porte de leur cinéma. Le film pèche par un troisième acte répugnant au possible et une critique ambivalente des idéaux de beauté d'aujourd'hui.
Note : ★★★
Critique : Goupil
Autre
critique, autre point de vue – The Substance vu par le Professeur Grant :
Inoculez-vous
La Substance, le film choc du dernier Festival de Cannes
Imaginez un monde dans
lequel vous pouvez générer une meilleure version de vous-même, plus jeune, plus
belle, plus sexy. Pour accoucher de ce double parfait, il vous suffirait de
vous inoculer la Substance, un sérum de jouvence aux ingrédients tenus secrets.
Les instructions sont claires et ne permettent aucune exception : en tant
qu’entité unique, vous ne faites qu’un. Vous devez donc partager le temps. Par
conséquent, vous ne pouvez vivre qu’une semaine sur deux selon un principe
simple ; pendant que l’un vit sa meilleure vie, l’autre végète dans un état
léthargique.
Elisabeth Sparkle, star
quinquagénaire sur le déclin tout juste virée de son émission d’aérobic, se
laisse séduire par ce produit miracle, fourni par un mystérieux laboratoire, et
donne le jour à Sue, sa « copie parfaite ». La Substance établissant
une relation symbiotique entre les deux enveloppes corporelles, Elisabeth doit
transférer sa conscience d’un corps à l'autre tous les sept jours, sans
exception. Le hic, c’est que l’osmose théorique entre les deux femmes va peu à
peu se muer en rivalité malsaine, avec des conséquences irréversibles dans leur
chair.
Les
injections contre les injonctions
Pour son deuxième film,
après sa série B quelque peu surcotée Revenge,
Coralie Fargeat s’attaque, non sans dérision, au rapport au corps, et en
particulier aux injonctions qui pèsent sur la beauté féminine, à travers une
kyrielle de thématiques abordées sur le ton de la satire horrifico-féministe :
l’aliénation esthétique, le culte du corps, de l’éternelle jeunesse et cette
tendance à en faire un modèle obligatoire à Hollywood, la dictature des normes
et les pressions exercées sur les femmes pour se conformer aux fantasmes masculins,
le recours désespéré à la chirurgie esthétique…
Au moyen d’une mise en
scène sophistiquée, clinquante et sans concession, reflet d’une démarche
jusqu’au-boutiste, la Française livre un uppercut salvateur qui entend bien
réveiller les consciences sur les thèmes susmentionnés. Devant sa caméra, l’incroyable
Demi Moore, qui retrouve ici un vrai grand rôle de cinéma, et la formidable Marguaret
Qualley, fille d’Andie MacDowell, se livrent à un jeu de massacre aussi jouissif
et captivant que foncièrement éprouvant. C’est que la plastique de cette fable d’humour
noir décapant, qui cherche constamment la connivence avec son audience, ne vous
épargne pas avec ses visions trash, ses scènes cauchemardesques ou encore ses
séquences d’hémoglobine versée par hectolitres.
Ad
nauseam
Autant biberonnée au
cinéma bis qu’aux classiques du fantastique, la réalisatrice convoque
l’imaginaire de David Cronenberg, se rappelle au bon souvenir de John
Carpenter, cite explicitement Stanley Kubrick, se frotte aux pellicules cultes
du boddy horror (The Blob, The Fly),
tout en digérant parfaitement ces influences pour en tirer une œuvre singulière
et radicale, à la fois gore et transgressive, qui brocarde au vitriol le
jeunisme ambiant.
Un défouloir anxiogène
sous amphétamines qui pèche malgré tout par ses nombreux excès. On en veut pour
preuve son troisième acte surchargé, anormalement long et grotesque, qui se vautre
dans un enthousiasme anar bas de plafond et vire in fine au délire grand-guignolesque
faussement provoc, ridicule et consternant. Forgeat pousse tous les potards à
fond la caisse, en rajoute ad nauseam pour susciter vainement l’écœurement.
Plus de mesure n’aurait pas fait de mal.
Note : ★★★
Critique : Professeur Grant
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