Lilo & Stitch

 


L’histoire touchante et drôle d’une petite fille hawaïenne solitaire et d’un extra-terrestre fugitif qui l’aide à renouer le lien avec sa famille.



Lilo & Stitch : une relecture calibrée, mais appliquée

Lilo & Stitch ou l’histoire d’un extraterrestre au regard globuleux, reconverti en icône pop et peluche de chevet, qui revient par la grande porte du live action, sous la houlette de Dean Fleischer Camp, jadis artisan délicat du surestimé Marcel the Shell with Shoes On. Le résultat ? Une œuvre qui oscille entre relecture appliquée et joli divertissement, sans jamais prétendre à la transcendance. Mais faut-il toujours tout réinventer pour plaire ?

Premier constat : c’est visuellement somptueux. Rarement la tropicalité d’Hawaï aura été capturée avec autant d’éclat numérique. Les effets spéciaux, parfaitement intégrés, confinent au sans-faute. Stitch, modélisé avec un soin maniaque du détail, possède ce mélange irrésistible d’extravagance et de tendresse qui fonctionne à merveille, en particulier sur les plus jeunes pupilles, lesquelles, à en juger par les rires et les exclamations enthousiastes dans la salle obscure, ont parfaitement adhéré à la proposition de Mickey.

La mise en scène, sans verser dans la virtuosité, reste fluide et lisible, servie par une direction artistique éclatante et une distribution irréprochable : les acteurs, enfants comme adultes, font preuve d’une sincérité désarmante. L’humour, bien que gentiment téléphoné, parvient à réveiller quelques zygomatiques fatigués. C’est bienveillant, ça se laisse regarder avec plaisir, et le métrage parvient à ménager un vrai capital sympathie.

Produit d’appel

Mais, car il y a un « mais » – et une production estampillée Disney sans petits bémols est aussi rare de nos jours qu’un blockbuster sans easter eggs – le récit reste d’un classicisme confondant. Le canevas narratif suit scrupuleusement celui du dessin animé « doudou » de toute une génération (2002, déjà !), au point de donner parfois l’impression de cocher des cases plus que de raconter une histoire. Le scénario, balisé à l’extrême, manque cruellement d’audace : les quelques libertés prises ne bouleversent jamais l’équilibre initial, et l’écriture, sans être indigente, demeure fonctionnelle, évitant soigneusement toute aspérité.

Plus gênant peut-être : cette frénésie à avancer, à enchaîner les péripéties sans jamais s’autoriser un temps de pause. On aurait aimé quelques respirations, des silences habités, des moments suspendus où le deuil, la solitude ou la différence auraient pu s’incarner avec plus de profondeur. Le film préfère l’efficacité au ressenti, le rythme à l’émotion. Il en résulte une certaine superficialité dans le traitement de thématiques pourtant fortes : l’acceptation de soi, la famille choisie, la reconstruction après la perte. Ce ne sont pas les intentions qui manquent, mais bien l’espace pour les laisser fleurir.

Et puis, comment ne pas regretter que Dean Fleischer Camp, artiste sensible et conteur minimaliste dans son précédent long-métrage, soit ici réduit à un rôle de chef d’orchestre exécutif ? Sa patte, sa poésie, son goût du petit détail qui dit tout semblent ici étouffés sous les contraintes d’un cahier des charges millimétré. Difficile de ne pas percevoir derrière cette fiction un objet de commande, pensé comme une pièce maîtresse d’une stratégie marketing redoutablement huilée.

Installé sur le trône du merchandising décomplexé made in China, Stitch n’est pas seulement un personnage : c’est une marque, une franchise qui fait pleuvoir les billets verts comme personne. Rappelons que la créature, depuis ses débuts dans les années 2000, génère un empire économique propre à rendre jaloux n’importe quel magnat de l’industrie. De ce fait, le film est une gigantesque publicité de luxe pour la licence, pas une œuvre d’art.

Une comédie pour toute la famille

Cela étant dit, le charme opère. Malgré sa facture trop policée, ce Lilo & Stitch version 2025 parvient à accomplir avec brio ce qu’on attend d’une comédie familiale : il divertit, il émerveille, il rassure. Il offre aux petits une porte d’entrée sur des valeurs universelles et aux grands un moment de répit visuel et narratif, nonobstant quelques longueurs. Ce remake en prises de vue réelles ne trahit pas l’original, il le reproduit fidèlement, parfois trop, mais sans (trop de) cynisme apparent. Et si les velléités artistiques s’effacent derrière les impératifs commerciaux, elles n’en sont pas pour autant inexistantes.

En définitive, le produit répond à son appel : mignon tout plein, il appuie là où ça fait du bien, dans un divertissement pur jus. Cette relecture s’impose comme une réinterprétation honorable, calibrée mais attachante, d’un classique des années 2000. Une superproduction qui ronronne plus qu’elle ne rugit, certes, mais dont la tendresse, l’humour et l’efficacité méritent qu’on s’y attarde. À défaut de nous bouleverser, ce Lilo & Stitch nous rappelle qu’il n’est jamais inutile de reparler de différence, de résilience et de la puissance du lien familial, même quand celui-ci inclut un monstre de l’espace passé maître dans l’art délicat de la destruction.

Note : 
Critique : Professeur Grant

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