The Wolf of Wall Street


L’argent. Le pouvoir. Les femmes. La drogue. Les tentations étaient là, à portée de main, et les autorités n’avaient aucune prise. Aux yeux de Jordan et de sa meute, la modestie était devenue complètement inutile. Trop n’était jamais assez…






Voilà. Il n’aura pas fallu attendre longtemps pour dénicher le premier chef-d’œuvre cinématographique de 2014. Premier jour de l’an, premier film vu au cinéma et premier petit bijou cinq étoiles. Oui, oui, vous avez bien lu «cinq étoiles»! Ecrivons-le sans détour: ‘The Wolf of Wall Street’ est à positionner dans le «top 5» de la filmographie de Martin Scorsese. C’est bien simple, s’il n’y a qu’un seul métrage à voir en ce mois de janvier, c’est celui-là. Voici trois bonnes raisons qui devraient vous convaincre de vous rendre fissa dans les salles obscures:

1. Martin Scorsese au sommet de son art

On avait quitté Martin Scorsese, il y a deux ans, avec un bel hommage à Georges Méliès dans ‘Hugo’. Une fiction qui, nonobstant la technique éblouissante, peinait à se situer entre la production à destination des jeunes pupilles et l’œuvre pour cinéphile averti. Aujourd’hui, Marty a retrouvé sa ligne de conduite - ou plutôt d’inconduite - qui a jadis fait la force de son cultissime ‘Casino’. Le septuagénaire signe ici un film somme sur l'envers du rêve américain, sur l’ascension puis la chute d'un self-made-man, le faraud Jordan Belfort, jeune prince de l’«hubris cité» (entendez également lubricité) que représente Wall Street.

Frasques, vices, débauche, stupre, dépravation etc., Scorsese se fout de la censure, se moque du puritanisme américain et se joue du qu’en-dira-t-on avec une liberté frondeuse, une fougue séditieuse, un affranchissement personnel qui lui fait retrouver ses jeunes années de réalisateur assoiffé de cinéma. Et il l’accomplit avec un plaisir communicatif qui passe à travers l’écran. Son sens de l’image et du montage se révèle brillant tandis que sa mise en scène est à la hauteur des exubérances du protagoniste que l’on pourrait facilement résumer par l’apophtegme suivi à la lettre par tout bon millionnaire mégalomane et borderline qui se respecte: sex, drugs & rock’n roll.

2. Leonardo DiCaprio doit (enfin!) décrocher l’Oscar

Durant sa carrière, Leonardo DiCaprio a été de tous les bons plans. Avec une filmographie sans fausse note mêlant des cinéastes comme, en vrac, Steven Spielberg, Christopher Nolan, Clint Eastwood, Sam Mendes, Ridley Scott, Woody Allen, James Cameron, Sam Raimi et des interprétations à chaque fois réussies, on se dit que le bougre d’à peine trente-neuf ans n’a plus rien à prouver. Et pourtant, jusqu’à 2013, il s’était glissé dans une seule et unique catégorie de personnage ne démontrant donc pas toute l’étendue de son talent. Bref, il tournait en rond.

Il fallait bien un Quentin Tarantino pour modifier la donne. Le réalisateur lui confie un super rôle de bad guy dans son western ‘Django Unchained’. Et le spectateur de (re)découvrir le comédien sous un tout nouveau jour. Formidable en tant que Gatsby en mai dernier pour la caméra de Baz Luhrmann, DiCaprio l’est encore nettement plus en Jordan Belfort, ce fameux Loup de Wall Street, cador à la réputation sulfureuse et big boss d’une boîte de courtage spécialisée dans la vente de penny stocks (NDLR: actions bas de gamme à maximum deux dollars avec 50% de commissions pour le courtier). Disons-le tout de go, sa performance vaut l’Oscar du meilleur acteur. Une récompense que le trentenaire n’a jamais reçue. Injuste. Leonardo DiCaprio n’a jamais été autant habité par un rôle. Le film fourmille de séquences d’anthologie (la scène où, hyper-défoncé, Belfort rampe vers sa Lambo ou encore l’orgie dans l’avion) et le comédien en est souvent le moteur.

3. Trois heures jouissives!

Jouissif. Purement et simplement jouissif, répétons-le! ‘The Wolf of Wall Street’ dure trois heures mais jamais un film aussi long n’est passé aussi vite. Généralement, la durée importante d’un métrage est un contre-argument. Ici, c’est l’inverse. La dimension cathartique du récit fonctionne à merveille. On se plait à vivre par procuration les innombrables incartades et fredaines (bacchanales endiablées, lancées de nains, rail de cocaïne à même l’anus d’une nana, luxure à gogo et autres déviances amorales en veux-tu en voilà) d’un antihéros fat, lubrique et cupide qui se rappelle que «more is never enough». Une sorte de caricature des vaniteux «golden boys» de la finance des années 90 qui voyaient la bourse comme un gigantesque eldorado.

Le rythme effréné, les seconds rôles savoureux (un tordant Jonah Hill, un inoubliable Matthew McConaughey qui recommande vivement l’onanisme et l’excellent Jean Dujardin en banquier suisse véreux), l’incontournable bande originale (qui convie notamment Plastic Bertrand, Umberto Tozzi ainsi que les Foo Fighters) et surtout, une histoire délirante entre décadence et fulgurance, tels sont les points forts d’une œuvre étourdissante qui doit se regarder comme une satire démonstrative de l’Amérique face au capitalisme.

Immanquable.


Note:
Critique: Professeur Grant

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