Borg McEnroe



Borg/McEnroe est un film sur une des plus grandes icônes du monde, Björn Borg, et son principal rival, le jeune et talentueux John McEnroe, ainsi que sur leur duel légendaire durant le tournoi de Wimbledon de 1980. C’est l’histoire de deux hommes qui ont changé la face du tennis et sont entrés dans la légende, mais aussi du prix qu’ils ont eu à payer.






Borg – McEnroe : jeu, set et match… et film !

La petite balle jaune est boudée par le septième art. C’est un fait. A peine se souvient-on du poussif « Wimbledon » avec le duo Kirsten Dunst / Paul Bettany. Rien de mémorable. Mais, ce mois-ci, deux films sur le tennis débarquent simultanément dans nos salles obscures. Outre l’hollywoodien « Battle of the Sexes » avec le tandem Emma Stone / Steve Carell, il y a le scandinave « Borg McEnroe » qui se donne pour mission de mettre en scène « le match du siècle », soit la confrontation entre ces deux légendes, en final sur le fameux gazon londonien. Derrière la caméra, on retrouve le Danois Janus Metz. Pour le commun des mortels, ce patronyme n’évoque rien. Mais pour nous, cinéphiles endurcis, il résonne à nos oreilles comme l’auteur du formidable documentaire « Armadillo » sur le cynisme de la guerre en Afghanistan, sorti en 2010.

Sverrir et Shia

Rassuré par l’artiste qui tient les manettes, on s’interroge alors sur la distribution. Et là aussi, c’est une belle surprise. Proposer à Shia LaBeouf de lacer les baskets de l’irascible New-yorkais est un choix qui saute aux yeux. Sans conteste l’un de ses meilleurs rôles. A ses côtés, on découvre le sosie du lifteur à la crinière blonde, l’acteur Sverrir Gudnason, inconnu au bataillon. Tous deux remarquables, ils sortent le grand jeu et parviennent à composer des personnages antinomiques nuancés qui vont bien au-delà de la caricature faite par les médias. Car si le réalisateur relate bien évidemment les différences notoires entre les jeux joueurs emblématiques à coup d’oppositions bien tranchées (la glace et le feu, le gentleman et le rebelle, le calme et la colère, la force et la manière, le droitier et le gaucher, la raison et l’émotion, le bloc monolithique et la rage juvénile…), c’est aussi pour épingler ce qui les relie (trauma durant l’enfance, le rapport difficile au père, la passion et la détermination chevillées au corps, l’instinct de perfection, la peur de perdre, les excès, la pression…). Ainsi, aussi différents soient-ils, ces deux génies de la raquette partagent de nombreux points communs.

La face cachée de l’IceBorg

Cela émis, dommage que le film soit si déséquilibré. En effet, il s’agit davantage d’une radioscopie à un moment précis dans la carrière du Suédois plutôt qu’une véritable biographie sur les deux joueurs. D’ailleurs, le titre de travail du métrage, « Borg » en l’occurrence, ne ment pas sur les ambitions de la production : privilégier le point de vue du control freak. La mention « McEnroe » a été rajoutée pour des raisons marketing évidentes au cours des sorties américaines et européennes. Il est donc finalement peu question de celui qui fut aussi caractériel que pétri de talent. Et c’est là où le bât blesse. Le réalisateur nous tease l’œuvre que cela aurait pu (dû ?) être et frustre d’emblée le spectateur avide d’en savoir plus sur l’outsider et bad boy des courts. Car s’il sonde la face cachée de l’« IceBorg », il ne gratte que la surface de la psychologie du « Super Brat », ce qui nous laisse sur notre faim. Par ailleurs, le film souffre de quelques imprécisions comme le fait qu’il fasse croire aux spectateurs que c’était la première fois que les deux sportifs se rencontraient, or c’était la… huitième fois !

A perdre haleine

A l’image du vibrant « Rush » sur la rivalité révérencieuse en F1 entre Niki Lauda et James Hunt, la réussite de « Borg McEnroe » tient moins en ses qualités techniques, irréprochables tant au niveau de la mise en scène (sobre, classique mais efficace) que dans la reconstitution des années quatre-vingt, qu’en son récit agencé sur base de flash-back savamment dosés. C’est que la finale de Wimbledon 1980 offre au scénariste Ronnie Sandahl la matière idoine pour confectionner un drame psychologique sous tension aussi palpitant que fascinant. Celui-ci place naturellement le climax du film sur le duel épique dont Janus Metz exploite brillamment la dramaturgie pour en tirer un dénouement à perdre haleine. Ainsi, même ceux qui connaissent l’issue seront happés par l’adrénaline et l’intensité d’une rencontre qui aura vu un des deux joueurs rater pas moins de sept (!) balles de match.
En somme, « Borg McEnroe » est un biopic rondement mené, aussi grisant que passionnant, qui devrait sans trop de mal agripper un public hermétique aux sports de raquettes.


Note :
Critique : Professeur Grant

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