All The Money in The World
Rome, 1973. Des hommes masqués kidnappent Paul, le petit-fils de J. Paul Getty, un magnat du pétrole connu pour son avarice, mais aussi l'homme le plus riche du monde. Pour le milliardaire, l'enlèvement de son petit-fils préféré n'est pas une raison suffisante pour qu’il se sépare d’une partie de sa fortune.
Gail, la mère de Paul, femme forte et dévouée, va tout faire pour obtenir la libération de son fils. Elle s’allie à Fletcher Chace, le mystérieux chef de la sécurité du milliardaire et tous deux se lancent dans une course contre la montre face à des ravisseurs déterminés, instables et brutaux.
I. Making of(f)
« All
The Money in The World » ou le film qui a davantage fait parler de lui
pour ses scandales successifs que pour ses qualités intrinsèques. Un métrage
hors du commun ne serait-ce que par sa production houleuse. Et il ne faut pas
remonter bien loin pour comprendre où tout a commencé. Après l’échec artistique
d’ « Alien : Covenant » sorti en mai dernier, Ridley Scott
a directement noyé son chagrin dans la réalisation avec un thriller centré
autour de l’affaire Getty, « true
story » de ce milliardaire qui n’a pas voulu payer la rançon pour
sauver son petit-fils des mains de ravisseurs italiens. Ainsi, en juillet
dernier, les premiers coups de manivelle étaient donnés. Dans le costume du
grand-père pingre, Kevin Spacey. Un choix douteux voire bancal : un
quinqua noyé sous une tonne de maquillage et de prothèses hyper visibles (voir
la première bande-annonce) pour jouer un octogénaire ? Une erreur de
casting d’autant plus incompréhensible que le papa de « Blade Runner »
avait déjà un petit faible pour Christopher Plummer, 88 ans, mais jugé pas
assez bankable par le studio.
Cela
émis, le tournage se passe sans encombre nonobstant les heures passées à
vieillir l’acteur génialissime de « Se7en » et « House of
Cards ». Il faut faire vite car le film doit absolument sortir avant 2018
afin d’être éligible pour les futurs Oscars. C’est que les producteurs croient
fortement à son potentiel et notamment aux prestations de Michelle Williams et
Kevin Spacey. Et puis, patatras ! En automne dernier, en pleine
post-production, celui qui fut primé pour « American Beauty » tombe
en disgrâce suite aux nombreuses accusations d’agression et de harcèlement
sexuels diffusées en parallèle de l’affaire Harvey Weinstein. Une mauvaise
publicité vécue comme une catastrophe pour l’équipe de production, laquelle ne
peut pas se permettre de repousser la sortie de six mois afin que la
controverse se tasse. En cause, l’arrivée toute prochaine d’une œuvre concurrente
sur la même histoire : la série « Trust » pilotée par Danny
Boyle qui débarque sur la chaîne FX en mars 2018.
Afin
de ne pas pénaliser les personnes qui ont travaillé d’arrache-pied sur cette
œuvre et, surtout, ne pas ruiner les chances du film de décrocher l’une ou
l’autre récompense durant la saison des cérémonies (Golden Globe, Oscar etc.),
Scott fait contre mauvaise fortune bon cœur : il prend la folle décision
d’effacer purement et simplement les scènes de celui qui est désormais
anathématisé et de les retourner avec… Christopher Plummer, son choix initial. Un
challenge de taille. Heureusement, le Canadien est disponible. Mieux, Michelle
Williams et Mark Wahlberg sont tous deux prêts à reprendre du service. La
première quasiment gratuitement, le second moyennant un « tout petit »
million et demi de dollars en supplément. Histoire d’effacer le désagrément
subi… Et voilà qu’un deuxième scandale éclate. Pourquoi une telle différence
alors que les deux comédiens sont représentés par la même agence ? Une
communication malvenue alors que l’écart des salaires entre hommes et femmes
est pointé du doigt. La production s’en serait bien passée…
II. Making on
Toujours
est-il que la gageure est « hénaurme ». Voyez plutôt : retourner
une vingtaine de scènes (entendez une trentaine de minutes) à seulement six
semaines de la sortie. C’est le branle-bas de combat ! L’équipe repart en
tournage du 20 au 29 novembre, profitant par la même occasion des vacances de
Thanksgiving. Ces reshoots coûteraient
la bagatelle de dix millions de dollars voire plus. Ce qui pique au portefeuille.
Mais ces frais supplémentaires sont nécessaires. D’autant plus qu’il faut aller
vite car il y a encore du boulot en post-prod : finalisation du montage, du
mixage son, des effets visuels… Il faut donc mettre le prix. Est-ce que cela en
valait la peine ? Oui, car à aucun moment dans le film, on ne se doute de
quelque chose. Le remplacement n’a eu aucun impact sur la vision du métrage. A
peine s’aperçoit-on de l’incrustation numérique de Plummer en plein désert. Le
Britannique est parvenu à retourner un bad
buzz en véritable coup de maître ; les professionnels du métier louent
alors les aptitudes de gestionnaire et de technicien du réalisateur. Un exploit
qui restera dans les annales du septième art et qui donne envie de découvrir le
making-of, pour peu qu’il soit honnête, sans coupure, et surtout sans langue
de bois.
Ridley
Scott signe ici un thriller psychologique haletant conduit par un scénario peu
avare en suspense et rebondissements. Un récit finement écrit par David Scarpa
qui exploite brillamment le potentiel dramatique de chaque personnage. Il
propose d’ailleurs un beau portrait de femme à Michelle Williams, bouleversante
de fébrilité en mère courage tiraillée entre les coups de fil des kidnappeurs
qui réclament l’argent qu’elle ne possède pas et le refus de son beau-père, enclin
à dépenser des millions de dollars pour une œuvre d’art mais incapable de
lâcher le moindre kopeck pour son petit-fils. Christopher Plummer offre à cet
avare plein de morgue et rongé par la cupidité une froideur qui heurte le
tout-regardant. Une performance théâtrale qui sied parfaitement au personnage
et logiquement récompensée par une nomination aux récents Golden Globes. A ses
côtés, Mark Wahlberg soigne son interprétation dans un rôle en creux. Mais
l’acteur le plus bluffant reste Romain Duris dans la peau du ravisseur
Cinquanta. Un Français qui joue un Calabrais s’exprimant en anglais avec un
accent italien, avouons-le, c’était plutôt casse-gueule. C’est sans compter le
talent de l’Arnacoeur, lequel s’offre ici une très belle carte de visite à
Hollywood.
Enfin,
visuellement, « All The Money in The World » est tout simplement superbe
et prouve que Ridley Scott est sans conteste l’un des meilleurs artisans de l’image
dans l’industrie cinématographique californienne. Avec sa reconstitution
d’époque tirée au cordeau et le magnifique travail opéré par Dariusz Wolski sur
la photographie, et plus précisément sur les jeux d’ombres, le film prend des
allures d’œuvre d’art. Son visionnage est un ravissement constant. De la belle
ouvrage en somme, qui prouve que le metteur en scène n’a rien perdu de son légendaire
flair esthétique. On en veut pour preuve le prologue aux accents dolce vita, l’image passant
progressivement du noir et blanc à la couleur. Un véritable geste de cinéma !
In fine, après la déconfiture « Alien : Covenant », le
Britannique se rachète de la plus belle des manières avec un métrage qui,
au-delà de la performance technique effectuée, restera dans la mémoire des
cinéphiles comme étant l’un de ses meilleurs thrillers.
Note : ★★★★
Critique : Professeur Grant
Critique : Professeur Grant
4 étoiles ? Pour moi,Ridley Scott tombe dans la caricature et ne trouve plus sa sève créatrice.Plummer sauve le jeu même si je m'interroge sur sa nomination prétendue aux Oscars,annoncée bien avant que le film ne soit distribué... Ça en dit long sur le procédé, non? Pour moi,le film est décevant et bien en-deça des 4 étoiles accordées
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