Une année difficile
Albert et Bruno sont surendettés et en bout de course, c’est dans le chemin associatif qu’ils empruntent ensemble qu’ils croisent des jeunes militants écolos. Plus attirés par la bière et les chips gratuites que par leurs arguments, ils vont peu à peu intégrer le mouvement sans conviction…
Toledano-Nakache, estampille de la comédie bleu-blanc-rouge
A l’instar du beaujolais nouveau,
on attend avec impatience la dernière fiction du tandem « Toledano-Nakache »,
fleuron cinématographique hexagonal. Une sorte de valeur sûre dans le paysage
de la comédie française. Hormis un premier pas hésitant (Je préfère qu’on reste
amis), la constance qualitative du reste de leur filmographie parle pour eux. Ecrivons-le
sans détour, on y trouve que des incontournables. Des réussites prenant pour
thèmes des sujets de société intemporels ou qui font l’actualité. Lisez plutôt :
Nos jours heureux (pochade sur les
colonies de vacances), Tellement proches
(satire sur les réunions de famille), Intouchables
(mélo sur le handicap), Samba (portrait
d’un sans-papier), Le Sens de la fête
(film choral sur l’organisation d’événements), Hors normes (plongée dans le monde de l’autisme). Même sur la
petite lucarne, le duo pétris de talent convainc : la série acclamée En thérapie pour Arte. Autrement dit, ce
que la paire touche se transforme en or.
Surconsommation et solastalgie
Tout le monde s’y retrouve :
le grand public se sent concerné par les sujets universels traités, les
cinéphiles respectés par la finesse d’écriture et les producteurs rassurés
grâce aux bénéfices engrangés par des métrages qui font florès. C’est dire si l’on
attendait avec enthousiasme leur huitième collaboration pour le grand écran. Avec
Une année difficile, à découvrir en
ce moment dans les salles obscures, Eric et Olivier s’attaquent à la thématique
du surendettement. Albert (Pio Marmaï) et Bruno (Jonathan Cohen), deux pieds
nickelés croulant sous les crédits à la consommation, croisent par hasard le
chemin de jeunes militants écolos. Plus attirés par les cervoises gratuites que
par les enjeux environnementaux, ils vont peu à peu intégrer le mouvement sans grande
conviction politique et faire la connaissance de la combative et éco-anxieuse Cactus
(Noémie Merlant), une jeune femme engagée et charismatique. Deux visions s’entrechoquent :
la fin du mois vs la fin du monde.
En plein dans le mille
Comme à l’accoutumée, Eric
Toledano et Olivier Nakache maîtrisent leur sujet et parviennent à nous dérider
tout en nous interpellant sur des problématiques contemporaines. Quel que soit
le registre, ils réussissent dans leur entreprise. Que ce soit pour amuser,
émouvoir ou questionner, les auteurs, aussi à l’aise dans la satire sociale que
dans le mélodrame, tapent en plein dans le mille. Si le film fourmille de
qualités (dialogues ciselés, casting impeccable, situations rocambolesques), il
n’est pas exempt de tout défaut. Etonnamment, les réalisateurs semblent avoir
un peu perdu la main sur l’une de leurs forces : le sens du rythme.
Quelques séquences tirées en longueur (l’intrusion ubuesque dans la Banque de
France), des ficelles scénaristiques trop épaisses (romance artificielle, final
hors-sol bien trop facile) et un récit qui s’essouffle aux deux tiers enraient
quelque peu la mécanique comique de l’ensemble.
Mais pas de quoi se montrer
frileux pour autant. Désopilant, profond, tendre, cette Année difficile parfaitement calibrée et ouvragée ne manque pas de
charme, ni de mordant, et offre, in fine, un divertissement populaire de bonne
facture. Vous auriez tort de ne pas en profiter !
Note : ★★★
Critique : Professeur Grant
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